La ministre de la culture, qui trouve que le dispositif reproduit les inégalités culturelles et sociales, souhaite modifier l’offre sur la plate-forme pour « inciter notamment à aller au théâtre ou à l’opéra ».
Depuis sa généralisation en mai 2021, c’est la première fois qu’un ministre de la culture émet des critiques sur le fonctionnement du Pass culture. « J’ai des réserves sur sa pratique. Je souhaite réformer ce passe pour qu’il ne soit pas au service de la reproduction sociale – j’ai la conviction profonde que c’est ce qu’il est aujourd’hui –, mais au service de la démocratisation culturelle », a expliqué Rachida Dati, mardi 19 mars, lors de sa première audition devant la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale.
Selon la ministre, cette plate-forme numérique, projet prioritaire de la politique culturelle d’Emmanuel Macron, qui permet à tous les jeunes âgés de 18 ans de disposer d’une enveloppe de 300 euros pour accéder aux activités culturelles de leur choix, « ne remplit pas tout à fait son rôle. Elle reproduit souvent les inégalités culturelles et sociales, que ce soit en termes d’accès à la culture ou de diversification des pratiques ».
Déjà, le 12 mars, devant la commission de la culture du Sénat, Rachida Dati avait indiqué son souhait de « revoir l’éditorialisation de cette application », pour « mieux présenter les spectacles » et « lever les inhibitions sociales pour ne pas dire mentales ». A ses yeux, le passe ne permet pas, pour l’heure, de « lutter contre le sentiment du “ce n’est pas pour moi” ». Pour appuyer son propos, la ministre a cité en exemple, devant les députés et devant les sénateurs, le témoignage d’un jeune de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), diffusé le 17 février sur France Culture dans l’émission « Sous les radars ». Walid raconte : « Un jour, avec des potes, on est allés voir une pièce de théâtre. On était les seuls Maghrébins et Noirs dans la salle. Ça nous a grave refroidis, cette expérience. On s’est dit “plus jamais”, parce que c’est traumatisant. » Bien qu’il ne dise pas s’y être rendu grâce au Pass culture, cet exemple illustrerait, selon Rachida Dati, la nécessité d’améliorer la « médiation », en associant les « acteurs de l’éducation populaire ».
Outil de consommation
Alors que le budget du Pass culture a été épargné par les annulations de crédits décidées par Bercy fin février, tout se passe comme si la ministre entendait montrer qu’elle s’active afin que l’enveloppe importante dévolue à ce dispositif (251 millions d’euros en 2024) soit mieux utilisée pour atteindre ses objectifs de démocratisation culturelle. Et ce, aussi bien sur sa part individuelle (300 euros à 18 ans) que collective (200 euros de la 6e à la terminale permettant aux professeurs de financer des sorties et activités culturelles).
Lire la suite sur lemonde.fr