Le 21 avril 2002, pour la 1e fois en France, l’extrême droite arrive au second tour de l’élection présidentielle. Le milieu culturel se mobilise immédiatement. Mais pour l'historien Christian Delporte, la véritable réaction culturelle vient de plus profond, du côté de l'ancêtre de l'image virale.
Claude Lelouch, cinéaste, 2002 : "Il faut que tous les artistes se mobilisent. Il est d’autant plus grave ce cauchemar, que Le Pen est un bon acteur."
Patrice Chéreau, metteur en scène, 2002 : "Le programme du Front national est une absence totale de programme. C’est le refus de l’art vivant, c’est le refus des auteurs vivants, c’est l’exclusion des auteurs, c’est de nouveau les listes d’auteurs interdits, ceux qui seront interdits de jouer…"
Anne Roumanoff, humoriste, 2002 : "Les gens n’écoutent plus les hommes politiques. Ils peuvent nous écouter, nous, c’est ce que j’espère."
Jérôme Deschamps, metteur en scène, 2002 : "Et je pense qu’il faut un sursaut républicain."
Le 21 avril 2002, pour la première fois en France, l’extrême-droite arrive au second tour de l’élection présidentielle. Immédiatement, le monde de la culture - réalisateurs, comédiens, plasticiens, rappeurs... se mobilise : défilés, concert au Zénith, manifestations, clips de réaction distribués dans les villes où le FN fait le plus haut score…
Une lame de fond
Mais ce n’est pas là qu’il faut chercher la mobilisation culturelle la plus importante. L'historien de la culture et des médias Christian Delporte a analysé un corpus important de contenus produits et diffusés au printemps 2002 : " C’est la première véritable mobilisation d’Internet dans un cadre politique-citoyen. Ce qui est assez impressionnant, c’est surtout la créativité en si peu de temps. C’est-à-dire que tous les jours, il y a des choses nouvelles."
C'est donc aussi la première fois qu'en France, dans cet entre-deux-tours, de jeunes créatifs saisissent Internet comme l’outil de leur génération pour mobiliser, en créant et partageant des images qu’on n’appelle pas encore virales. Christian Delporte : "On partage les informations, sur les pétitions, les communiqués de presse, les associations, les manifestations… On partage du texte, et puis on partage de l’image. Des individus, tout simplement artistes, graphistes, qui ont décidé de s’opposer à Le Pen. Et ces images, elles sont libres de droits, elles sont reprises un peu partout sur Internet, et on en trouve d’ailleurs sur les manifestations, collées sur les pancartes."
Ces ancêtres des mèmes sont réalisés par des jeunes entre 25 et 35 ans, dont c’est souvent le premier engagement militant. Leur principe actif : le détournement de références générationnelles.
Christian Delporte : "Donc vous avez des références à la fois aux jouets que cette génération-là a utilisés quelque temps plus tôt, comme le Lego. Référence également dans ces années Sida au préservatif. Le bulletin de vote devient le préservatif, le préservatif Chirac bien sûr, qui va éviter le danger Le Pen. Les films aussi, on reprend des affiches, Shrek par exemple, qui a marqué toute une génération, l’affiche est reprise pour brocarder le monstre Le Pen."
Un illustre ancêtre
Création effervescente et anonyme, travail de groupe, libre diffusion et reproduction… des principes présents déjà dans les affiches de mai-68...
Lire la suite sur franceculture.fr