Critiqué pour avoir imposé « d’en haut » son dispositif, la société pass Culture engage le dialogue avec les élus locaux. Objectif : inscrire progressivement dans le paysage culturel local le dispositif promis par Emmanuel Macron en 2017.
Nommé en septembre 2021, le deuxième président de la société SAS pass Culture, constituée par l’Etat pour conduire ce projet, présente un profil qui ne doit rien au hasard. Jusque-là directeur de l’Action culturelle de Marseille (Bouches-du-Rhône) et président de l’Association des directeurs des affaires culturelles des grandes villes et agglomérations de France, Sébastien Cavalier vient donc du monde des collectivités. Une marque d’attention de la part du gouvernement, qui s’est vu reprocher d’avoir élaboré son dispositif « sans concertation » avec le monde local, déplore le président de la Fédération nationale des collectivités pour la culture (FNCC), Frédéric Hocquard. « Il est dommage que nous n’ayons pas été sollicités, car nous aurions pu apporter notre écot à la réflexion, au regard de nos expériences passées », souligne-t-il.
Rencontre avec les associations d’élus
Cette négligence, Sébastien Cavalier la reconnaît, en maniant la litote. « Il est possible qu’il n’y ait pas eu assez d’échanges avec les associations d’élus, lâche-t-il. Je n’ai pas la capacité de réécrire l’histoire. Mais soit on reste sur le sentiment d’un dialogue insuffisant au départ, soit on regarde comment on peut maintenant travailler ensemble pour que tout le monde tire le meilleur bénéfice du dispositif . » Il a donc, ces derniers mois, pris son bâton de pèlerin pour rencontrer les représentants des collectivités, de France urbaine à l’Association des maires ruraux de France (AMRF), en passant par Régions de France et la FNCC.
Il a surtout sillonné le pays, d’Est en Ouest et du Nord au Sud, afin de convaincre les élus locaux de l’intérêt d’encourager les équipements culturels de leur territoire, en particulier ceux dont ils ont la gestion, à inscrire des offres dans l’application, afin de leur donner une plus grande visibilité.
Faire le lien entre pass Culture et équipements locaux
Au cours de ce périple, il a notamment rencontré l’adjoint (SE) à la Culture d’Angers (Maine-et-Loire), Nicolas Dufetel. Tout en regrettant, lui aussi, une méthode « doublement descendante, car on reçoit du gouvernement un dispositif qu’on doit ensuite orienter vers nos structures », l’élu se dit séduit par une application « qui géolocalise les offres culturelles qu’un jeune a autour de lui ».
Aussi a-t-il demandé à ses services de faire le lien entre le pass Culture et les équipements locaux. Et son conseil municipal a voté une délibération afin de mettre en place des conditions générales d’utilisation (CGU). Comme Cahors (Lot), dont le maire (PS) Jean-Marc Vayssouze-Faure, considère que, « si cet outil numérique permet de toucher de nouveaux publics et leur faire découvrir l’offre culturelle présente sur leur territoire, ce sera positif, donc on joue le jeu. » Tout en se désolant également que l’AMF, dont il copréside la commission Culture, ait été simplement « informée » du projet, et non « associée ».
Ancienneté et expertise des collectivités
« Les jeunes sont friands de ce type d’outils, difficile toutefois de développer à nos échelles », poursuit Jean-Marc Vayssouze-Faure. Au niveau communal, sans doute. Mais pas à celui d’une région, comme Bourgogne-Franche Comté, qui a déployé sa e-carte avantage jeunes. Pour huit euros par an, les moins de trente ans peuvent bénéficier de réductions ou de la gratuité chez 2 200 partenaires, dans le domaine de la culture, du sport, plus généralement des loisirs, de la mobilité aussi. « Un passeport pour la liberté », doté d’une application smartphone avec géolocalisation, dont le gouvernement « s’est inspiré pour la dupliquer », assure la vice-présidente de la région à la Jeunesse, Sarah Persil (Groupe écologistes et solidaires).
L’Etat « s’est appuyé sur l’ancienneté et l’expertise d’un territoire, se félicite-t-elle, et tout le monde est légitime à intervenir en la matière. Nous avons besoin de l’Etat comme l’Etat, de notre réseau. » Ainsi, dans le cadre d’une convention de partenariat entre le Centre régional d’information jeunesse (CRIJ) et la société pass Culture, chacun informe son auditoire sur les avantages de l’autre.
La généralisation du passe : un déclic
L’Etat n’a, en revanche, pas établi une telle relation avec la région Pays de la Loire, qui dispose aussi d’une version dématérialisée pour un objet similaire, nommé e-pass jeunes. « Afin de s’adapter aux outils utilisés par la jeunesse », précise la vice-présidente (UDI) Isabelle Leroy, qui préside la commission Culture, Sports et Vie associative. « Le gouvernement a fait les choses de son côté, observe-t-elle, mais nous faisons en sorte que le message sur nos dispositifs respectifs passe au mieux auprès de leurs utilisateurs potentiels. »
A Belfort, qui doit adopter en mai une délibération permettant aux équipements municipaux d’entrer dans l’application pass Culture, c’est le projet gouvernemental qui a entraîné le maire à mettre en place en janvier un...
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