Désormais obligés d'acheter un visa de travail pour jouer hors du Royaume-Uni, les groupes et chanteurs devraient être plus chers à programmer dans les grandes manifestations européennes.
Les Beatles à l'Olympia en 1964, les Sex Pistols au Chalet du Lac en 1976, Blur au Bataclan en 1994... À l'aube de leurs immenses carrières internationales, nombreux sont les jeunes artistes britanniques à avoir donné de la voix loin de la perfide Albion. Autant de concerts inoubliables - où chaque spectateur présent pourra dire toute sa vie, avec une pointe de nostalgie dans le cœur : «J'y étais !». Des spectacles qui pourraient malheureusement se faire de plus en plus rares. À moins d'un revirement politique.
Fans et artistes britanniques alertent depuis quelques jours le gouvernement de Boris Johnson sur l'avenir des musiciens. Ces derniers et leurs équipes, victimes de l'échec des négociations du Brexit, vont désormais être obligés de s'offrir un visa de travail pour tourner en Europe. Des coûts supplémentaires qui devraient particulièrement impacter les chanteurs et groupes émergents, en les empêchant de s'exporter. Un véritable camouflet pour le Royaume-Uni, premier pourvoyeur de musique sur le Vieux Continent.
Une situation qui préoccupe également les programmateurs de festival européens. Dans une enquête publiée par le NME , plusieurs d'entre eux regrettent la tournure actuelle des choses, et espèrent un revirement de la part de l'exécutif britannique. «Ce sera une grosse perte pour tout le monde. Ça va rendre très difficile de booker de nouveaux groupes. Il y a des artistes émergents partout, et, pour être honnête, le Royaume-Uni a généralement plus de groupes prometteurs que d'autres pays», explique Maja Starcevic, programmatrice principale du festival serbe EXIT. «Nous devons mettre la politique de côté et trouver une solution commune à ce problème. J'espère que cela sera possible. Il serait plus juste que les artistes, les équipes et leurs collaborateurs puissent voyager sans visa, tout comme lorsque le Royaume-Uni était dans l'Union européenne», ajoute-t-elle.
Un point de vue que rejoint Eric Van Eerdenburg, directeur du festival Lowlands aux Pays-Bas. «Je pense que la faute en incombe aux politiciens et aux négociateurs britanniques. Ils ont créé des conditions de concurrence inégales, il est donc normal que l'Union Européenne dise : "Démerdez-vous". J'espère néanmoins que nous pourrons résoudre ce problème l'année prochaine, ou avant», déclare-t-il. Lors de l'édition annulée de 2020 du Lowlands, une dizaine d'artistes d'outre-Manche avaient été annoncés en tête d'affiche (Liam Gallagher, Bring The Horizon, The Chemical Brothers, Stormzy ...).
Un confinement administratif
Pour Eric Van Eerdenburg, les nouveaux coûts supplémentaires liés aux problèmes de visa vont également devenir «horribles et très contraignants» pour les artistes britanniques, et ces derniers pourraient souffrir de la compétitivité des 27. «À Lowlands, nous bookons en majorité des groupes du Royaume-Uni. Mais les artistes européens sont de plus en plus forts et notre pourcentage de groupes en provenance d'autres pays d'Europe augmente. Cela donnera peut-être une impulsion supplémentaire aux petits groupes européens, car, inversement, il est devenu très difficile de tourner depuis le Royaume-Uni», reconnaît-il. «Je pense que si un groupe est vraiment fort, il y aura toujours un promoteur ou un festival qui voudra le réserver au prix nécessaire pour le faire venir - mais ce sera beaucoup moins facile.»
Même son de cloche du côté des musiciens. Jeremy Pritchard, bassiste du groupe de Manchester Everything et membre de la Featured Artists Coalition, une prestigieuse organisation défendant les droits des artistes, craint que...
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