Pour la première fois, une enquête sur les pratiques culturelles dans les territoires ultramarins a été réalisée, juste avant la pandémie mondiale. Publiée en octobre dernier, cette étude analyse en détail les habitudes culturelles en Guadeloupe, Martinique, Guyane, Mayotte et à La Réunion.
Plutôt parler en créole ou en français ? Aller au cinéma ou regarder un film depuis chez soi ? S’informer sur les réseaux sociaux ou via les chaînes de télévision ? En Outre-mer, les usages et pratiques culturelles diffèrent parfois de celles en Hexagone. Avec le département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation (DEPS), l’Insee a réalisé une enquête sur les habitudes culturelles des ultramarins. Cette enquête regroupe une analyse détaillée de ces pratiques et permet aussi un suivi des comportements culturels.
"C’est la première fois qu’une extension de cette enquête est faite dans les DOM-TOM", commente Antonin Creignou, chercheur au sein de l’Insee Antilles-Guyane qui a coréalisé l’enquête. "Elle a été réalisée en 2018-2019, juste avant la crise sanitaire", précise également le spécialiste de l’Insee. Au moins 1000 personnes de 15 ans et plus ont été sondés dans chacun des territoires (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion et Mayotte).
Le créole comme langue favorisée aux Antilles et à La Réunion
Partout dans les départements ultramarins, le créole reste régulièrement utilisé pour communiquer. Neuf Martiniquais sur dix ont déclaré maîtriser le créole martiniquais, c’est-à-dire être capable de s’exprimer à l’oral. 71% d’entre eux le parlent dans la vie quotidienne, que ceux soit chez eux, au travail, ou avec des amis. En Guadeloupe, 73% des habitants parlent le créole guadeloupéen quotidiennement.
En général, la pratique du créole reste plus ancrée chez les 60 ans et plus, même si les jeunes générations l’utilisent fréquemment : 72% des 15-39 ans le parlent au quotidien en Martinique, 69% en Guadeloupe.
"Il y a beaucoup de similitudes aux Antilles sur la pratique du créole lorsque l’on regarde les résultats. La seule différence concerne les habitudes d’informations : il y a plus de Guadeloupéens qui s’informent en créole que de Martiniquais", explique Antonin Creignou. En effet, 54% des Guadeloupéens s’informent en créole contre 26% des Martiniquais.
Le carnaval et les chanté Nwel font également partie intégrante de la culture antillaise, ou le créole est mis à l’honneur. Près de la moitié des Guadeloupéens ont participé aux chanté Nwel, contre 38% en Martinique. Par ailleurs, la musique est au cœur des pratiques culturelles des Antillais : trois quarts des Guadeloupéens écoutent de la musique tous les jours ainsi que six Martiniquais sur dix.
Sur l’île de La Réunion, le créole réunionnais a aussi une place centrale, grâce à la musique. 81% des Réunionnais de 15 ans et plus ont déclaré maîtriser la langue et 82% ont écouté des musiques en créole réunionnais ou dans les styles musicaux des Mascareignes (séga, maloya…). "C'est parce que la langue créole est utilisée fréquemment que les musiques peuvent être plus facilement écoutées", explique Jamel Mekkaoui, chef de projet au sein de la division étude de l'Insee Réunion-Mayotte sur cette enquête. "Les styles musicaux des Mascareignes forment un marqueur fort du territoire."
Près de la moitié des Réunionnais regardent la télévision en créole réunionnais, mais seulement une minorité s’informe en créole.
Diversité linguistique en Guyane et à Mayotte
Outre le français, une quarantaine de langues sont parlées sur le territoire guyanais. Plusieurs créoles cohabitent, mais aussi le portugais, les langues des communautés de descendants de noirs marrons, les langues amérindiennes… Un Guyanais sur cinq parle le créole guyanais dans la vie quotidienne et un Guyanais sur dix le créole haïtien. Le portugais est parlé par 10% des habitants.
"La diversité linguistique est plus variée en Guyane, car il y a beaucoup d’immigration. Elle est plus répandue dans la Guyane plus profonde", ajoute Antonin Creignou. Cette richesse linguistique se retrouve dans les pratiques culturelles des Guyanais, et parfois, elle peut être un frein, comme le souligne le spécialiste : "Cette diversité peut engendrer des difficultés, comme l’accès aux services publics par exemple, ou l’accès à la littérature. Une partie de la population lit dans une seule langue".
À Mayotte, le shimaoré et le kibushi sont les langues les plus utilisées par la population. 81% des Mahorais ont déclaré maîtriser au moins l’une de ces deux langues (75% pour le shimaoré, 18% pour le kibushi). Le français est beaucoup moins répandu sur l’île, seuls 55% des habitants de Mayotte ont déclaré le maîtriser, surtout les...
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