La couleur verte dans le milieu du spectacle est l’objet d’une superstition tenace. Et bien française ! Pour des raisons qui ne sont sûrement pas celles que l’on croit...
Porter du vert sur une scène, monter dans un bus de tournée vert, concevoir une affiche en vert... La couleur verte est proscrite dans le spectacle car elle porterait malheur aux comédiens, danseurs ou musiciens. Plusieurs explications, qui relèvent de croyances, sont avancées.
Explication n°1
Selon la légende, Molière serait mort sur scène en jouant Le Malade imaginaire, le 17 février 1673. Le costume qu’il portait pour son rôle aurait été de couleur verte. Depuis, cette couleur est bannie des théâtres. Mais cette affirmation est doublement fausse : primo, le dramaturge portait alors du rouge, secundo, il n’est mort qu’après la représentation, emporté par la tuberculose, vêtu d’une robe de chambre de couleur amarante et grise...
Explication n°2
Malgré cela, il n’en fallait pas plus pour conforter une croyance populaire déjà existante : aux XVIe et XVIIe siècles, aucune technique ne permettait encore de fabriquer une teinture verte qui tienne bien sur les costumes. A la place, on peignait les textiles en vert, en utilisant un mélange d’oxyde de cuivre, de cyanure, toxiques, de vinaigre et d’urine, des composants pouvant être toxiques entre eux et auxquels on attribuait le décès de artistes.
Explication n°3
Ce serait une question de lumière. Aux XVIIIe et XIXe siècles, les théâtres avaient abandonné les bougies comme éclairage, au profit de lampes brûlant de l’oxyde de calcium (la “chaux vive”). Or, cette lumière ne mettant pas du tout en valeur le vert, on ne voyait pas les acteurs sur scène s’ils portaient cette couleur.
Explication n°4
Une autre explication nous vient d’outre-Manche. Selon les Anglais, comme, à l’époque, on jouait beaucoup à l’extérieur, sur des pelouses, dans la verdure, on distinguait difficilement les interprètes en costume vert.
Toute cette superstition se résumerait-elle à une simple question de culture ? Très certainement ! Car la couleur censée porter malheur diffère selon les pays. Si la couleur verte est réputée maléfique en France et au Royaume-Uni, dans ce pays, une autre couleur « porte-malheur » est le bleu, qui paraît noir à la lumière des bougies. En Italie, c'est le violet, et en Espagne, le jaune... Une chose est sûre : qui se rappelle avoir vu un artiste vêtu de vert trépasser sur scène ? Et que dire de notre photo : le Théâtre du Rideau vert ? Impensable en France, mais possible… au Québec.
Antoine Blondel