Conscients de leur fragilité, mais aussi pour s’adapter aux problèmes environnementaux, les festivals sont forcés de changer. Un thème débattu jeudi 12 janvier aux Biennales du spectacle à Nantes.
Des chiffres pour commencer… Selon une étude réalisée par le Prodiss (syndicat du spectacle musical), auprès de ses adhérents organisant des festivals, le nombre de festivaliers en 2022 est en hausse de 9 % par rapport à 2019. Une bonne nouvelle tempérée par un taux de remplissage en léger recul (74 contre 76 %), beaucoup de festivals ayant duré plus longtemps.
En parallèle, dit la même étude, les budgets (artistique comme technique) ont augmenté de quelque 25 %. Pas de surprise donc si 59 % des festivals ont été déficitaires en 2022 (43 % en 2019).
Après le Covid, les coûts en constante augmentation, la pression environnementale – et malgré leur succès – il est légitime aujourd’hui de se demander s’il ne faut pas réinventer le modèle des festivals. Une question qui a fait débat, cette semaine à Nantes, aux Biennales internationales du spectacle (Bis). Avec un plateau de professionnels pour y répondre.
Voir les mêmes artistes
Le constat le plus inquiétant est la hausse permanente des coûts artistiques. Le producteur angevin Christophe Davy y voit deux raisons. « Les artistes veulent gagner plus. Et cela touche notamment les festivals, car nous sommes sur un marché de l’offre et de la demande. Les festivals veulent les têtes d’affiche le week-end et il y a de la concurrence. Mais il n’y a pas que les cachets des artistes. Les coûts de production aussi ont augmenté. Même pour les artistes français qui se déplacent maintenant avec plusieurs semi-remorques, ce qui n’était pas le cas avant. »
Pour Christophe Davy, le grand public tient à voir les mêmes artistes. « Le streaming augmente ce phénomène. Si un ou deux titres marchent bien, l’artiste est très demandé. » Et le patron de Radical de philosopher : « Depuis vingt ans, la société va vers le plus, le plus gros, la financiarisation de tout. »
Devant ces faits, quelle équation doivent trouver les festivals ? L’an dernier, la tendance a été d’allonger la durée de l’évènement. Comme à Beauregard (près de Caen) ou à Rock en Scène (Paris), dont le directeur, Matthieu Ducos, précise : « Cela nous permet de mieux amortir les coûts fixes. Mais cela peut être une réponse à court terme qui était possible en 2022 car il y avait beaucoup d’artistes sur la route. »
Si ce modèle est applicable aux grands festivals (les Vieilles Charrues passent à cinq jours cette année), c’est plus compliqué pour les petits. « Et ce n’est pas notre volonté, insiste Lisa Bélangeon, coordinatrice du festival Au foin de la rue, en Mayenne. Notre objectif à nous est de faire vivre un territoire rural. C’est un enjeu de proximité avec une forte réflexion environnementale. Mais nous sommes impactés par les grands festivals ! Avec l’augmentation des cachets mais également le matériel. Le chapiteau que nous utilisions comme deuxième scène ne sera pas disponible cette année car il sera aux Vieilles Charrues. »
Une course au toujours plus
Co-président de France Festivals et ancien directeur adjoint du festival d’Avignon, Paul Rondin regrette cette course au toujours plus : « C’est aussi le modèle d’Avignon. Mon échec est de ne pas avoir su ralentir cette croissance effrénée. Faire moins et mieux pour mieux accompagner public et artistes. »
Le modèle du festival est paradoxal. C’est l’un des rares endroits où on touche de nouveaux publics. Jean-Philippe Thiellay, directeur du CNM (Centre national de la musique), estime indispensable que la filière s’interroge. « Je ne dis pas qu’il y a trop de festivals, mais qu’il y a une sur-offre. Peut-on continuer à avoir le même artiste...
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