Jean-Philippe Lefèvre a été élu président de la Fédération nationale des collectivités pour la culture (FNCC) le 13 avril, fonction qu'il avait assurée une première fois de 2018 à 2021. Il explique à La Gazette quels sont les enjeux de son nouveau mandat.
Vice-président (divers droite) en charge de l’action culturelle du Grand Dole, membre du Conseil économique, social et environnemental (Ceser) de Bourgogne-Franche-Comté et conseiller municipal en charge de la culture de la Ville de Dole, Jean-Philippe Lefèvre prend le relais de Frédéric Hocquard (Génération.s) à la tête de la Fédération nationale des collectivités pour la culture (FNCC), maison qu’il connaît comme sa poche, puisqu’il a exercé un premier mandat de 2018 à 2021.
L’élu jurassien entame ce nouveau mandat dans un contexte particulier pour les politiques culturelles (difficultés financières des collectivités, enjeux de la transition écologique, concertation sur la ruralité menée par le ministère de la Culture, qui sera suivie d’assises nationales, etc.).
Professeur d’histoire dans l’enseignement secondaire et au CNAM, Jean-Philippe Lefèvre attache une grande importance à la formation des élus sur les différentes problématiques des politiques culturelles. Précédemment, il était en charge de l’activité de formation de la FNCC, en tant que vice-président. Il est également convaincu que la FNCC doit être une fédération « militante ».
Dans quel état d’esprit abordez-vous votre nouveau mandat ?
Ma présidence sera celle d’un passeur vers une nouvelle génération d’élus : je souhaite préparer les jeunes adhérents à prendre en main, à terme, notre fédération. Je commence mon nouveau mandat avec le bonheur de constater combien les élus de 25 à 40 ans sont engagés pour la culture. Ils étaient nombreux à notre congrès.
Ce rôle de passeur est d’autant plus important que des élections municipales auront lieu pendant mon mandat. Nous devrons donc être prêts à accueillir de nouveaux adhérents.
Le contexte budgétaire n’assombrit-il pas l’horizon ?
Il y a un an, l’Observatoire des politiques culturelles (OPC) a publié une étude qui avait déconcerté les professionnels : elle montrait que, finalement, la plupart des collectivités avaient maintenu leurs budgets pour la culture.
A la FNCC, nous sommes évidemment parmi les plus vertueux en termes d’engagement en faveur de la culture. De plus, nos adhérents sont très attentifs aux artistes et aux opérateurs culturels. Je n’ai donc pas envie de dresser un tableau noir. Même les départements, dont certains observateurs disent qu’ils se retirent du champ culturel, continuent, pour certains, d’augmenter leurs crédits « culture », comme l’Isère.
Il est vrai que la légitimité du budget culturel sans aucun débat n’est plus de mise. Au lendemain de la Libération, la culture était un élément fort du nouveau pacte républicain, et ce n’est pas un hasard si elle est mentionnée dans le préambule de la Constitution de 1946. A cette époque, personne ne discutait le budget de la culture. Il y avait un pacte non écrit entre les gaullistes et les communistes. Nous avons changé d’époque. Aujourd’hui, tout projet culturel, plutôt que d’être justifié au regard des enjeux politiques – on pourrait dire « citoyens » – l’est trop souvent pour des raisons qui se limitent à la communication et à « l’entertainment ».
Quoiqu’il en soit et pour revenir à la question, les élus ont la légitimité démocratique de dire oui, ou non. Cela nécessite plus de pédagogie auprès des opérateurs culturels, dans un esprit d’acceptation réciproque.
Quelles sont vos priorités ?
Une première priorité concerne l’éducation artistique et culturelle [EAC]. Le temps de l’évaluation qualitative est venu. Autrement dit, nous devons nous interroger sur la finalité politique de l’EAC, au-delà des chiffres sur le nombre de projets qui s’empilent et de jeunes concernés.
Les élus doivent donner à l’EAC des objectifs politiques, et pas seulement quantitatifs. Il ne s’agit pas de faire de l’art pour l’art. La finalité de l’EAC doit être de bien préparer le futur citoyen, de rendre les enfants et les jeunes capables de discernement à travers la confrontation avec des esthétiques diverses et multiples.
Ce qui veut dire que nous, élus, devons être capables d’évaluer les projets à partir d’autres critères que les chiffres, en nous demandant si le projet en question a répondu à cette attente politique. Or, actuellement, la logique est plutôt celle de l’empilement des projets en raisonnant en termes quantitatifs : tant de classes impliquées, tant de jeunes concernés. Nous, élus, sommes d’autant plus attentifs à l’EAC que ce sont les collectivités qui en financent l’essentiel, à travers leurs opérateurs culturels.
Mais comment procéder à une telle évaluation ?
C’est un chantier que la FNCC va ouvrir. Cela pourra se faire lors d’un séminaire de nos adhérents à l’automne. Un débat lors du congrès des maires est aussi envisageable. Sans préjuger de la méthode à venir, nous pouvons d’ores et déjà imaginer qu’il faudra travailler sur le lien entre EAC et diminution de phénomènes comme le décrochage scolaire, ou le harcèlement, voire les troubles du comportement. Les évaluations propres à l’éducation populaire ont beaucoup à nous apporter.
Quelles sont vos autres priorités ?
Il s’agit de l’intelligence artificielle, du Printemps de la ruralité, et de l’outre-mer.
Lire la suite sur lagazettedescommunes.com