Autorisons, pour commencer, les théâtres nationaux à proposer quelques représentations par semaine pendant deux mois, plaide le directeur des Chorégies d’Orange, directeur de l’Opéra de Monte-Carlo et metteur en scène.
Monsieur le président, nous savons tous que la situation est difficile mais nous aurions besoin d’un espoir. Vous avez commencé à le faire naître en décidant de ne pas nous imposer un nouveau confinement strict, faisant fi, à juste titre , des demandes pressantes de votre Conseil scientifique. Cette décision, vous l’avez prise en homme politique qui sait prendre un risque mesuré tenant compte des facteurs humains qui traversent la société dont la préservation de l’équilibre vous revient.
Je vous propose de poursuivre résolument dans cette voie en vous attaquant maintenant à ce qui est devenu un tabou dans l’esprit de certains, je veux parler de l’ouverture des théâtres. Je dis bien théâtres, car je n’associe pas les musées qui sont actuellement au cœur de la réflexion de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot. Inutile en effet d’épiloguer sur la question des musées qui, nous l’espérons tous, connaîtra une issue heureuse et raisonnable d’ici peu, à l’instar de ce qui vient de se faire, par exemple, en Italie.
Je veux vous parler des théâtres, car ceux-ci et leurs publics souffrent. Et peut-être souffrent-ils sans raison, ce qui n’est pas juste même si on peut comprendre les préoccupations du Conseil scientifique.
Conscient de l’énormité de l’enjeu sanitaire, je vous soumets l’idée suivante. Ouvrez les théâtres nationaux et les théâtres subventionnés par la puissance publique. Ouvrez les théâtres où vous avez «la main», c’est-à-dire ceux qui relèvent directement de la politique culturelle.
Ces théâtres ont des personnels permanents à l’arrêt depuis trop longtemps. De même que l’on ne trouve pas de hooligans à la sortie des conservatoires, on ne connaît aucun exemple de «clusters» liés à la pratique publique du spectacle vivant. Ces théâtres, les vôtres Monsieur le président, c’est-à-dire ceux de l’ensemble des Français, ont un répertoire qu’ils peuvent mettre en œuvre dans des délais assez brefs et à moindres coûts. Ils ont des troupes, des acteurs, musiciens, danseurs, chanteurs, etc. qui peuvent se mobiliser et nous offrir un niveau d’excellence remarquable.
Dans quelques pays, européens ou d’autres continents, cela est possible. Vous le savez. Je vous demande respectueusement d’allumer une toute petite lumière dans la grande obscurité actuelle dont la noirceur profonde ne peut être que le ferment du pire. Ce pire, vous ne le souhaitez évidemment pas.
Tentons ne serait-ce qu’une expérience sur un temps limité mais suffisamment long pour qu’un constat sérieux soit fait. Quelques représentations par semaine, sur deux mois et sur l’ensemble du territoire, pour un public accueilli avec distanciation et toutes les autres précautions requises. Que risquons-nous? Que risquez-vous? Au pire, cela ne fonctionne pas et la situation de quelques théâtres nationaux à l’accès forcément limité ne sera qu’une infime goutte d’eau dans les difficultés actuelles.
Mais si ça marche, ce que je crois et que mes collègues croient unanimement, quel signal magnifique! Nous pourrons alors parler d’ouvrir d’autres salles, publiques et privées, des cinémas, envisager l’été des festivals avec espoir… tout le monde sera gagnant et surtout, vous aurez su donner de l’espoir et montrer à nouveau qu’en politique, il faut savoir prendre sa chance.
Je vous propose un...
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