RÉACTIONS - Oubli du patrimoine, «jeunisme systématique», annonces vagues... Ceux qui font vivre le secteur expriment leurs réserves quant au plan de relance du président.
Réinventer la culture au sortir du confinement. S'il n'a pas de «plan» pour remettre cette industrie fragile sur pieds, le président de la République a fait part de son souhait de «refonder une ambition culturelle pour le pays». Emmanuel Macron souhaite placer «le bon sens et la créativité» au cœur de ce chantier, a-t-il affirmé mercredi midi lors d'une conférence de presse en direct du palais de l'Élysée.
Ainsi, il a annoncé la réouverture des librairies, musées, disquaires et galeries d'art dès le 11 mai. Mais aussi l'instauration d'une «année blanche» pour les intermittents, comme le réclamaient ces derniers dans deux pétitions ayant récolté plus de 250.000 signatures à ce jour. Des annonces applaudies par les principaux concernés, mais jugées insuffisantes par Stéphane Bern.
Le patrimoine et la danse oubliés ?
Le «Monsieur Patrimoine» du président a salué sur BFMTV les mesures prises pour «l'armée invisible des intermittents qui font que festivals et théâtre peuvent exister». Mais Stéphane Bern s'est étonné qu'un seul mot ait été dit sur le patrimoine, secteur qui risque de pâtir de l'absence de touristes étrangers en France cet été. C’est «tout un monde économique» qui est oublié selon lui. «Je compte sur Franck Riester pour relancer le chantier du patrimoine, et proposer un “new deal”«, a-t-il dit, espérant un «élan collectif».
Quant aux représentations en plein air, on en fait déjà mais on ne va pas passer une sébile entre les passants pour ramasser de l'argent après.
Thierry Malandain, directeur du Ballet de Biarritz
Et il n'est pas le seul à se sentir oublié. «J'avais dit que si le président prononçait le mot danse, je serai un homme heureux, explique le directeur du Ballet de Biarritz Thierry Malandain. Je suis en effet très agacé qu'au milieu de la crise actuelle, cet art ne soit jamais cité. Et que nous recevions du ministère des sports et pas de la culture, des mesures absolument démentes concernant la reprise du travail pour les danseurs. Au vrai je n'attendais rien : la prolongation des droits des intermittents, c'est salutaire ; intervenir auprès du public empêché ou scolaire, c'est une des missions des Centres chorégraphiques nationaux depuis leur création il y a 40 ans. Quant aux représentations en plein air, on en fait déjà mais on ne va pas passer une sébile entre les passants pour ramasser de l'argent après. Les spectacles, c'est notre équilibre économique. Sans le chômage partiel nous coulons. Jusqu'à quand va-t-il être maintenu ?»
Autre sujet polémique, l'annonce d'un programme de commande publique pour les créateurs de moins de trente ans. Si l'idée plaît à François Hébel, directeur de la Fondation Cartier-Bresson, «il serait regrettable que la très bonne nouvelle du grand plan de commande publique pour les arts plastiques (ce qui inclue la photographie j'imagine) soit réservée aux moins de trente ans», a-t-il dit, déplorant un «jeunisme systématique qui ne fait pas sens».
Du pain sur les planches
Dans le monde du théâtre, l'agacement est palpable. Alors que le patron du Point-Virgule et du Théâtre Antoine Jean-Marc Dumontet confiait en début de semaine au Figaro ne rien attendre des annonces d'Emmanuel Macron, Bertrand Thamin, président du syndicat national des théâtres privés et codirecteur du théâtre de Montparnasse à Paris se dit clairement déçu par ce discours «certes volontaire, mais sans mesure concrète». Des annonces qui, selon lui, visent à apaiser les 750 signataires de la tribune du journal Le Monde dénonçant un oubli du monde de la culture la semaine dernière.
«On ne va pas faire répéter les comédiens sans perspectives d'ouverture de théâtre et de toute façon pas avant début juin, a-t-il déploré. On continue à être en attente de choses plus précises, on est content que les intermittents aient obtenu leur année blanche, mais on est loin du compte en ce qui concerne les entreprises privées. J'espère qu'il y aura quelque chose de prévu pour celles qui emploient des intermittents. Attendons de voir si le fonds de soutien du Syndicat des théâtres privés reçoit une nouvelle aide.»
Qu'avons-nous appris ? Il faut être précis, inventer, oui, mais dans quel cadre et comment ? Que nous donnent-ils comme autorisation ? Ils doivent aussi inventer un plan concret pour redémarrer
Jean-Michel Ribes, directeur du Théâtre du Rond-Point
Même son de cloche du côté du Théâtre du Rond-Point. Son directeur Jean-Michel Ribes, est agacé et...
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