
Une employée de l’institution genevoise a découvert début mars une caméra dissimulée dans une douche par un voyeur, après un précédent en 2014. La direction, mise en cause dans une lettre signée par 51 employées ou ex-employées, a interdit d’ébruiter l’affaire sous peine « de s’exposer à des poursuites ».
Depuis maintenant plus d’un mois, une ambiance délétère règne dans les couloirs du prestigieux Grand Théâtre de Genève (GTG). Et un vent de fronde féminine se lève. Depuis le 8 mars exactement, quand, après avoir pris sa douche, une employée a découvert une caméra dissimulée derrière l’un des éclairages du vestiaire des techniciennes et des « placeuses », qui assurent l’accueil des spectacles.
Doté d’une carte mémoire, l’appareil filmait en continu les femmes – plusieurs dizaines – qui se changeaient et se douchaient dans ce local situé au troisième sous-sol de l’édifice.
Mais une caméra peut en cacher une autre. À l’occasion de cette découverte, les employé·es ont été informé·es par un mail des ressources humaines, consulté par Mediapart, qu’un autre appareil clandestin avait déjà été retrouvé en 2014, cette fois dans les vestiaires des danseuses du ballet de Genève. Qui n’en avaient jamais été avisées.
« Ça a été un choc d’apprendre, plus de dix ans plus tard, qu’on avait été filmées à notre insu », raconte à Mediapart une ancienne danseuse de la compagnie. « Les vestiaires sont un lieu d’intimité, on prend deux douches par jour, on y passe des heures, on s’y épile… Je ne comprends pas comment on a pu nous cacher ça », s’émeut la jeune femme, qui appartenait au ballet en 2014. Comme les autres victimes, elle n’a pas pu déposer plainte, les faits étant désormais prescrits.
À ce « choc » s’est ajouté celui d’avoir été prévenue par une ex-collègue, le Grand Théâtre n’ayant pas pris la peine d’informer les danseuses en poste à l’époque.
« Trahison des institutions »
Même indignation chez les placeuses qui ont utilisé le vestiaire et les douches du troisième sous-sol ces derniers mois et ne sont plus en poste. « Le Grand Théâtre n’a même pas pris la peine de m’envoyer un mail, alors que j’étais encore utilisatrice de ces vestiaires deux mois avant cet événement. On ne m’a proposé ni accompagnement psychologique ni échange avec mes anciens supérieurs. Je n’ai reçu aucune information sur les recours légaux disponibles », décrit l’une d’entre elles.
Cette jeune femme, qui se dit « horrifiée », raconte avoir été « envahie par la colère » quand elle a eu connaissance du précédent de 2014. « Ces vestiaires représentent désormais, pour nous toutes, la trahison des institutions censées nous protéger », dit-elle, ajoutant que « le sexisme s’est infiltré jusque dans nos vestiaires », au sein de la « première institution culturelle genevoise en termes de budget alloué ».
Une autre placeuse, employée en CDI par le Grand Théâtre pendant plus de quatre ans, a quant à elle appris dans...
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