Premières victimes de la crise sanitaire, elles seront les dernières à rouvrir. Elles sont très dépendantes des tournées internationales, elles-mêmes paralysées.
L'annonce du ministre de la Santé mercredi de limiter la jauge des rassemblements autorisés, de 5.000 à 1.000 personnes dans certains territoires, a été perçue comme le coup de grâce pour les patrons de grandes salles . « Notre secteur est pointé du doigt alors que nos expertises permettent certainement d'assurer davantage de sécurité sanitaire qu'au supermarché ou dans le métro ! Et ces mesures sont changeantes alors que nous devons travailler avec une durée d'anticipation entre six mois et deux ans ! » déplore Olivier Haber, qui dirige la Seine Musicale, à Boulogne-Billancourt.
Lundi dernier, l'Assemblée générale du Prodiss, le syndicat du spectacle vivant privé, était le premier événement accueilli à la Salle Pleyel depuis… le 15 mars ! Et quasiment aucun concert n'y est programmé d'ici à la fin de l'année. « C'est catastrophique pour ces grandes salles qui représentent de gros investissements, longs à amortir » se désespère Aurélien Binder, à la tête de Fimalac Entertainment qui exploite Pleyel mais aussi 24 Zénith, Arena ou centres de congrès en régions et 6 théâtres à Paris. Pas moins de 11 millions d'euros de travaux ont été menés en 2015 pour transformer Pleyel en une scène spécialisée dans les musiques actuelles, avec 2.000 places assises et 500 de plus avec sa fosse amovible.
Lily Fisher qui dirige le Zénith de Paris pour la société de Daniel Colling (Zénith de Nantes et de Toulouse aussi) est sur la même longueur d'onde. « Nos trois salles sont en zone rouge. A Paris où il y a 150 dates de concerts par an habituellement, pas un seul depuis le 8 mars. Et les spectacles sur 2021 s'annulent à leur tour. Pour autant nous avons une salle à entretenir, des loyers lourds » explique-t-elle. Encore a-t-elle la chance d'avoir, à Paris, l'Etat pour bailleur, qui ne réclamera pas de loyers cette année. Tous les bailleurs n'ont pas été aussi généreux…
Et pour les salles qui essaient de rouvrir un peu, c'est souvent très compliqué. Ainsi la Seine Musicale compte une salle de 4.300 places pouvant monter à 6.600 places assises/debout, pour les grands shows, quasiment à l'arrêt, et un auditorium de 1.150 sièges pour la musique classique et le jazz, où est en résidence Insula Orchestra , un ensemble subventionné par le conseil général des Hauts-de-Seine pour ses missions de service public, tout comme l'Académie du chanteur Philippe Jarrousky et la Maîtrise du département. « Pour tous ces résidents et pour maintenir le lien avec le public, nous sommes tenus d'ouvrir, mais cela impose des charges, un moindre recours au chômage partiel car nos équipes de billetterie, marketing, sécurité, maintenance doivent être sur le pont. La double peine ! » observe Oliver Haber.
Pire en régions
Pourtant 2020 aurait dû être une année phare : Fimalac Entertainment avait loué les lieux pour répéter « Starmania » de la mi-août à la mi-septembre, puis y jouer la comédie musicale jusqu'à fin janvier. « Il a été impossible de reprogrammer quoi que ce soit à la place. Nous aurons juste accueilli le Mipim et les NRJ Music Awards le 5 décembre prochain » poursuit Olivier Haber.
Heureusement son sponsor, le Crédit Mutuel, ne l'a pas lâché, tout comme ses actionnaires Sodexo et TF1, la chaîne y ayant même organisé deux émissions. « Nous allons néanmoins afficher deux millions de pertes alors que nous attendions un million de bénéfices » poursuit Olivier Haber, qui a imaginé des formats jeune public, des concerts classiques en plein air dans des transats, des projections gratuites d'opéras en extérieur, espérant une aide du département.
Alors que la programmation des salles à partir de 4.000 à 5.000 places dépend à plus de 50 % des artistes internationaux, un retour à la normale en 2021 paraît compromis avec le regain du virus dans nombre de pays. « Aujourd'hui il n'y a pas de plan social, mais il ne faudrait pas que ça dure ! » note Olivier Haber.
Et la situation n'est guère plus confortable en régions : car si le Zénith de Paris peut se permettre de programmer le concert d'une star pour un soir, ses homologues sur les territoires s'inscrivent dans...
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