Le village gersois a été contraint d’annuler son événement-phare de la saison estivale en raison de la crise sanitaire liée au Covid-19.
Le cuir plutôt que les cuivres. Ce qui ne laisse pas d’étonner, cette première quinzaine d’août à Marciac (Gers), c’est que le terrain de rugby a toujours ses poteaux, son herbe verte et le silence, hormis le vendredi soir, quand l’équipe de Promotion Honneur régionale s’y ébroue. On aurait dû trouver là un chapiteau blanc de près de 6 000 places assises, épicentre du festival de jazz, simple mouvement d’éducation populaire devenu, quarante-deux ans plus tard, une référence mondiale.
Le projet fou d’une poignée d’amateurs dont Jean-Louis Guilhaumon, président du festival, maire de Marciac et de la communauté de communes et vice-président de la région Occitanie. Dans le Gers, on s’imaginait que si un jour Jazz in Marciac n’avait pas lieu, c’est que M. Guilhaumon n’existerait plus, ou bien le jazz ; personne n’avait vu venir le Covid-19.
Il fallut un jour, pour cause d’orage pyrénéen, interrompre le concert de l’icône locale et académicien de la trompette jazz, Wynton Marsalis, et le redonner le lendemain sur la place du village débordant de monde ; Marciac avait su faire. Cette fois, la tâche a semblé trop risquée.
« Un territoire qui porte le deuil »
Le village s’inquiète. Avec huit restaurants à l’année, deux hôtels et deux supermarchés, l’offre commerciale n’est pas conçue pour ses quelque 1 250 habitants, mais pour les 250 000 visiteurs accumulés sur trois semaines de festival. Et quand Jazz in Marciac prend froid, toute la région tousse : en 2014, les retombées économiques ont été estimées à près de 20 millions d’euros sur son intercommunalité. Au vrai, « JIM » essaime bien au-delà, dans ce coin du Sud-Ouest dépourvu de grands sites touristiques.
« C’est tout un territoire qui porte le deuil de cet événement et connaît une difficulté, admet M. Guilhaumon. Les habitants savent que si Marciac se porte bien pour un territoire rural, il le doit au jazz. » Mary Tsedri, 72 ans, dont vingt de bénévolat à encaisser et imprimer des billets de concert, ne cache pas son désarroi : « C’est l’horreur. Marciac est triste comme tout. Je pensais que M. Guilhaumon accepterait des groupes sur la place. Après tout, c’est dehors. Mais non, rien. »
Ce qui frappe, c’est le silence, dans ce village où l’on ne peut, d’ordinaire, faire dix mètres sans entendre le ronflement d’une contrebasse ou la stridence d’une trompette. Certains commerçants auraient aimé que...
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