Lors de la dernière négociation sur la réforme de l’assurance chômage, l’organisation patronale a tenté de durcir, sans succès, les conditions d’accès au régime de l’intermittence. Et enterré du même coup des propositions d’amélioration salutaires.
Que vaut la culture pour le Medef dans le pays de l’exception culturelle ? Pas grand-chose. L’attitude de la fédération patronale, dans la dernière ligne droite de la négociation sur l’assurance chômage, en est une nouvelle et insupportable démonstration. Explications. Début octobre, les organisations patronales et syndicales du secteur de la culture (cinéma, spectacle vivant, musique et audiovisuel) se retrouvent pour négocier un nouvel accord sur les règles d’indemnisation des intermittents du spectacle contenues dans les annexes VIII et X du règlement général de l’assurance chômage. Artistes et techniciens bénéficient en effet d’un régime spécifique pour répondre à la précarité de l’emploi artistique où les périodes de travail (spectacles, tournages, concerts…) alternent avec des périodes de chômage.
La discussion est très contrainte. Sur le fond comme sur la durée. La lettre de cadrage du gouvernement demande aux partenaires sociaux de diminuer, à terme, les dépenses de l’Unédic de 15 % et, a minima, qu’un éventuel accord s’autofinance. Pas question de créer de nouvelles dépenses sans mettre en face des économies du même ordre. Le temps aussi est compté. Les organisations syndicales du secteur disposent en tout et pour tout de trois semaines pour trouver un accord, qu’elles devront ensuite transmettre à la direction de leurs organisations respectives. Charge à ces dernières d’en intégrer les dispositions dans un accord interprofessionnel plus large qui doit, lui, être impérativement trouvé avant la mi-novembre. Faute de quoi, c’est le gouvernement qui imposera ses vues sur les nouvelles règles d’indemnisation du chômage. Et ça, les syndicats n’en veulent pas, pour éviter une mainmise totale du gouvernement sur l’assurance chômage, un des derniers bastions du paritarisme.
Deux représentations annulées à Bastille
Pendant trois semaines, les organisations syndicales du secteur de la culture travaillent d’arrache-pied pour rapprocher leurs positions et, le 27 octobre, trouvent finalement un compromis qui améliore les conditions d’indemnisation de certaines catégories d’artistes et de techniciens, tout en remédiant à plusieurs dysfonctionnements du système, le tout sans augmenter les dépenses du régime. Une gageure.
Moins de deux semaines plus tard, à l’occasion de la réouverture des négociations au niveau interprofessionnel cette fois, le Medef adresse son projet de protocole d’accord aux autres syndicats. C’est la douche froide. Dans le chapitre relatif aux intermittents du spectacle, l’organisation patronale balaie d’un revers de la main l’accord unanime signé entre les organisations d’employeurs et de salariés du spectacle et exige une modification d’ampleur des conditions d’accès au droit à l’assurance chômage. Alors qu’il faut actuellement 507 heures pour en bénéficier, le Medef fixe désormais la barre à 580 heures pour les artistes et 610 pour les techniciens. La protestation est unanime. La CGT Culture fait ses comptes et estime que si ces nouvelles règles entraient en vigueur, elles feraient sortir du régime près d’un technicien sur quatre et un artiste sur deux. De son côté, l’Union syndicale des employeurs du secteur public du spectacle vivant (USEP-SV) dénonce « une posture irresponsable » et « une proposition totalement déconnectée de la négociation qui s’est menée en amont et en trahit la forme et l’esprit ». Sur le terrain, les esprits s’échauffent. Deux représentations de l’Opéra Bastille – Cendrillon et Turandot – sont coup sur coup annulées à l’appel du syndicat Sud, et la crainte d’un blocage des principales institutions culturelles du pays commence à se faire jour.
Le lendemain, coup de théâtre. Après une...
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