Malgré la crise, des directeurs de théâtre ouvrent de nouveaux lieux partout en France. Ils espèrent attirer un public plus large avec une programmation diversifiée.
«Donner naissance à un théâtre c’est servir un peu notre civilisation», estime Charles Aslangul, le maire de Bry-sur-Marne (94), qui vient juste d’en inaugurer un, magnifique de 208 places avec cinq loges dont une baptisée «Jean-Paul Belmondo». «C’est le premier projet abouti de mon mandat», s’enorgueillit l’ancien conseiller municipal qui cite Malraux: «La culture ne s’hérite pas, elle se conquiert.» Élu il y a deux ans à la tête de la municipalité, le trentenaire s’est empressé de nommer Virginie Pradal adjointe à la culture et responsable de la programmation. «Nous avons hérité d’un endroit qui était une salle des fêtes archaïque, explique cette ancienne pensionnaire de la Comédie-Française. Le maire a profité de mon expérience et de mon envie pour faire exister un lieu culturel.» Confiant, ce dernier a même multiplié le budget de la culture par 10, soit 300.000 euros («Il était bas», précise-t-il).
Comme à Bry-sur-Marne, en dépit de la situation sanitaire et du retard qu’ont pris les chantiers pendant les confinements, plusieurs théâtres voient paradoxalement le jour. Une aventure vécue par tous comme un geste fort et que tentent à la fois le public et le privé. Le 10 septembre, Roselyne Bachelot a ainsi inauguré la maison de la culture de Bourges, une scène nationale réhabilitée après plus de dix ans de travaux. «La période est difficile, mais l’ouverture est en elle-même un événement. Le lieu était symbolique, avec celle du Havre, c’était la deuxième maison de la culture de France voulue par André Malraux», indique son directeur, Olivier Atlan. De son côté, Loïc Bonnet, déjà à la tête du Théâtre à l’Ouest à Rouen et de l’Association des théâtres privés en régions (ATPR) en a ouvert deux autres dédiés à l’humour, l’un à Caen, en Normandie, le second à Auray, en Bretagne.
"Je souhaite que les gens qui ne sont jamais allés au théâtre aient envie de pousser la porte avec des tarifs plus qu’abordables"
Virginie Pradal, adjointe à la culture de la mairie de Bry-sur-Marne
La pandémie ne les a pas fait changer d’avis. Au contraire: «Ce théâtre est un pied de nez à la situation sanitaire, on ne doit pas vivre indéfiniment sous cloche et la culture a toute sa place dans les politiques publiques», assure le maire de Bry-sur-Marne. «Je suis optimiste et jeune dans ce métier, renchérit Loïc Bonnet, ces projets existaient avant le Covid.» À l’instar de ce dernier, pour Jean Bellorini, directeur du nouveau Théâtre Firmin-Gémier à Antony-Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine), le «spectacle est devenu un acte de résistance». Une volonté partagée par Frédéric Tovany, qui préside, après 33 mois de travaux, aux destinées d’une nouvelle salle conventionnée (Château-Rouge), à Annemasse (Haute-Savoie). «On sent une grande appétence pour la culture, il y a eu un appel d’air quand on a ouvert, on va surfer dessus», prévoit le responsable.
D’autant que, la vaccination aidant, le public semble désireux de revenir. «Il a deux fois plus envie de rire qu’avant», estime Loïc Bonnet. Début septembre, quand le théâtre de Bry-sur-Marne a ouvert sa billetterie, 650 billets se sont arrachés pour une salle de 208 places et Gaspard Proust a joué à guichets fermés trois soirs consécutifs. «Il y a eu incontestablement un engouement pour le théâtre», se réjouit Virginie Pradal. La directrice a également prévu Une vie de Maupassant avec Clémentine Célarié, Mon meilleur copain, la dernière pièce d’Éric Assous ou Drôle de campagne avec Frank Lebœuf. «Je souhaite que les gens qui ne sont jamais allés au théâtre aient envie de pousser la porte avec des tarifs plus qu’abordables», dit-elle.
Atténuer l’obstacle financier
À Bourges, Olivier Atlan a la même attente, il espère reconquérir le public dont un quart a moins de 26 ans, avec un passe et des cartes famille à des tarifs compétitifs. La maison de la culture regroupe dorénavant des salles pour des spectacles et des expositions, des cinémas, un bar et un restaurant. «On est passé de 40 à presque ...
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