Plusieurs musiciens se sont vu refuser d’embarquer leur instrument dans leurs déplacements professionnels.
Pourquoi les contrôleurs de la SNCF mènent-ils une vie impossible aux contrebassistes ? Pourquoi en font-ils trop ? Ce n’est pas l’artiste qui choisit pourtant, mais bel et bien la contrebasse qui choisit son artiste. Les contrôleurs en conçoivent peut-être quelque dépit. L’histoire de Stanislas Kuchinski, contrebassiste à l’Orchestre de Paris depuis 2002, interroge. Le musicien fait partie de Sirba Octet, ensemble renommé de musique klezmer. Soit, une vingtaine d’années d’études, des milliers d’heures de mise au point d’un « son » personnel avec ce ventre rond et ce dos galbé, fragile comme une fleur de serre.
Le vendredi 28 janvier 2022, Stanislas Kuchinski prend le 8361 à 13 h 42, en direction de La Rochelle (16 h 21). Son ensemble – huit billets de 1re classe et autant de cartes Grand Voyageur – se produit, le soir même à La Coursive, scène nationale de La Rochelle. Le bassiste restera à côté de l’instrument sur la plate-forme, entre deux voitures, de façon à ne pas gêner. Stanislas Kuchinski vient de passer, réglo, le contrôle du passe vaccinal et celui du billet.
Quatorze minutes avant le départ, un contrôleur le repère et lui demande de descendre. Kuchinski parlemente, la voiture est quasi vide, les quelques voyageurs installés le soutiennent, rien n’y fait. Le musicien propose de régler une amende pour ne pas compromettre le concert, le contrôleur refuse.
Le voici d’ailleurs qui revient avec un policier – plutôt gêné aux entournures. D’autres contrôleurs font preuve, à bord d’autres trains, de bon sens, voire d’empathie. Celui du 8361, lui, se prend pour sa fonction. Kuchinski descend, revient chez lui, prend son auto, rallie La Rochelle en cinq heures trente-deux minutes, 44 euros de péage, bilan carbone au top. Retour de nuit, après le concert.
« Trois prunes à 50 euros »
Ce zèle ferroviaire est pourtant fréquent et la mésaventure frappe au hasard. Strasbourg, 6 novembre : Bruno Chevillon, contrebassiste de renommée internationale, vient de triompher avec Lady M, l’opéra de Marc Ducret : « Depuis quelques mois, j’ai pris trois prunes à 50 euros, une à 150, pas mal de sermons, parfois ça se passe bien… J’ai beau leur dire qu’il m’est arrivé de défiler pour les personnels de la SNCF, il est des contrôleurs inflexibles… » L’amende est au petit bonheur.
Selon son règlement, la SNCF accepte trottinettes, vélos électriques, planches de surf, skis, poussettes, fauteuils roulants, cannes à pêche… Le « bagage spécial » ne doit pas dépasser 2 mètres. Une pétition circule (45 000 signatures), les violoncelles sont désormais tolérés. Mais pas les contrebasses. Sept sénateurs se sont...
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