Face aux annonces du Président de sauver la culture en proposant une année blanche aux seuls intermittents, de nombreux salariés, indépendants ou sous-traitants du milieu multiplient les tribunes pour se faire entendre. Et craignent que le «retour à la normale» se fasse dans le noir.
Sur le parking de la société Artys, à Saint-Michel-sur-Orge (Essonne), on pourrait entendre une mouche voler. Habituées aux tournées de Mylène Farmer, les cabines rouges décorées d’attrape-rêves ou de pass de tournées sont alignées comme des enfants sages. Leurs conducteurs ne les reverront pas de sitôt. Pourtant, 2020 s’annonçait comme une belle année pour le live avec les tournées de Céline Dion ou PNL, entre autres. Le 8 avril, les salles de cinéma allaient voir débouler James Bond et Cannes promettait une belle saison. En mars, l’interdiction progressive des rassemblements a laissé les salles obscures et les fosses vides «jusqu’à nouvel ordre». Artistes, techniciens, directeurs de production, attachés de presse, indépendants, auto-entrepreneurs, gérants et salariés en CDD d’usage (CDDU), se sont retrouvés sur le carreau. Le 30 avril, une tribune signée de 800 personnalités (Jeanne Balibar, Robin Campillo…) et publiée dans le Monde a attiré l’attention des pouvoirs publics. En réponse, le 6 mai, le Président annonçait un «plan pour la culture» avec une année blanche pour les seuls intermittents. Beaucoup se sont sentis oubliés et ont créé dans l’urgence des collectifs et monté des tribunes pour se faire entendre.
«Même bateau»
La plus récente, celle des Artisans des spectacles, a rassemblé plus de 1 500 signatures, avec le soutien d’une soixantaine d’artistes. Une fois n’est pas coutume, c’est en visioconférence que directeurs techniques, ingénieurs du son, gérante de catering et cuisinière, ont coécrit la tribune pour réclamer un plan de sauvegarde pour leurs activités (exonération des charges patronales, aide aux gérants…) et la prolongation des droits Pôle Emploi pour les employés en CDDU. «Pour qu’un spectacle fonctionne, il faut qu’il y ait du smile, qu’on mange bien, qu’on ait du bon matériel, que tout soit fluide. Nous sommes des sous-traitants du spectacle vivant et nos savoir-faire sont invisibles et pas reconnus, déplore Aymeric Sorriaux, directeur technique qui, comme la majorité du collectif, a lâché l’intermittence pour monter son entreprise, Teckoff, en 2018. On a commencé avec l’organisation des obsèques de Johnny, mais notre cœur d’activité, ce sont les tournées de Zénith.» Avec son associée Priscille Gréaud, ils avaient booké trois tournées et deux stades pour le deuxième trimestre. «Si l’activité reprend le 31 août, nous aurons perdu 50 % de notre chiffre d’affaires et nos trois années de bénéfice. Mes salariés sont intermittents et moi, je pioche dans mes économies», s’attriste le patron, qui a dû stopper ses futurs projets et remballer son matériel, stocké dans des camions en Ile-de-France. «On rentrait de quinze jours sur la route avec Christophe Maé. On croyait se retrouver dans le...
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