Expérimentée depuis deux ans dans quatorze départements, l’application permet aux jeunes de 18 ans de disposer de 500 euros pour accéder aux offres de leur choix.
La pandémie de Covid-19, qui plonge le secteur culturel dans une crise sans précédent, n’aura pas mis à l’arrêt le projet présidentiel du Pass culture. Après le vote parlementaire, le 17 décembre 2020, du projet de loi de finances 2021 prévoyant un budget de 59 millions d’euros (en hausse de 50 %) pour ce nouvel outil d’accès la culture pour les jeunes, la généralisation du Pass est en marche.
Expérimentée depuis bientôt deux ans dans quatorze départements, cette application géolocalisée – permettant aux personnes âgées de 18 ans de disposer de 500 euros pour accéder aux offres culturelles de proximité ou numériques de leur choix – devrait être accessible sur l’ensemble du territoire dans les mois qui viennent.
Orchestrée par l’agence Havas, « une large campagne de communication sera mise en œuvre en direction des futurs bénéficiaires », a indiqué Roselyne Bachelot, mardi 12 janvier, lors de son audition devant la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale. Le Pass pour tous les jeunes de 18 ans, ce sera donc pour 2021 mais la date précise de lancement « reste à définir au regard de la situation sanitaire et de la réouverture des lieux culturels, a précisé la ministre, car généraliser quand la culture est à l’arrêt n’aurait pas grand sens ».
Surtout, des modifications, visant à corriger les défauts originels du Pass, vont être apportées aussi bien sur le montant attribué que sur l’articulation de ce nouvel outil avec un parcours d’éducation artistique et culturelle (EAC). « La généralisation du Pass culture sera accompagnée d’un mécanisme complémentaire pour les moins de 18 ans dans le cadre scolaire afin de les préparer à une démarche d’autonomisation », a promis Roselyne Bachelot.
« Nécessité d’un processus de médiation »
Concernant 130 000 jeunes dont plus de 55 000 en Bretagne, l’expérimentation montre que les utilisateurs n’ont dépensé, en moyenne, que 137 euros après dix mois d’inscription (et 230 euros après vingt-deux mois). C’est pourquoi, lors de la généralisation du Pass, la somme sera ramenée à 300 euros.
En outre, des discussions se tiennent actuellement avec le ministère de l’éducation nationale pour mettre en place un dispositif assurant une meilleure utilisation du Pass. Afin de favoriser une diversification des pratiques culturelles, plusieurs scénarios sont sur la table : au lycée, des professeurs pourraient être appelés à devenir des « référents Pass culture » pour guider les élèves en leur proposant, par exemple, des listes de prescription. Avant de disposer à 18 ans d’un crédit de 300 euros à utiliser librement, les jeunes pourraient, dès 16 ans, avoir un Pass plus « sélectif », plus « restreint » (sans jeux vidéos par exemple), peut-être d’un montant de 200 euros. Objectif : les inciter à se tourner vers des pratiques culturelles plus patrimoniales et moins numériques.
« C’est l’ensemble de la politique publique en termes d’éducation artistique et culturelle qu’il faut mettre en perspective ! Ce que nous montre le terrain pour que l’EAC réussisse, c’est la nécessité d’un processus de médiation, un accompagnement des acteurs, et la volonté de transmettre », insiste Emmanuel Ethis, recteur de l’académie de Rennes et vice-président du Haut Conseil de l’éducation artistique et culturelle.
Après avoir émis des réserves face aux « fragilités du dispositif » et sa dimension avant tout marchande, la ministre de la culture parle désormais « d’un formidable outil d’émancipation » et se réjouit des chiffres de l’expérimentation. Malgré la fermeture des musées, cinémas et salles de spectacle, quelque 100 000 réservations ont été effectuées sur le Pass en décembre 2020. Le livre arrive toujours en tête (59 % des réservations et 35 % des montants utilisés), suivi par la musique et l’audiovisuel (abonnements à des plates-formes), les jeux vidéos et l’achat d’instruments de musique.
« Un objectif de 700 000 inscrits d’ici à la fin de l’année »
Afin de prendre en compte la crise sanitaire qui a limité les possibilités de réservations, « les périodes de confinement seront neutralisées, indique Damien Cuier, président de la SAS Pass culture qui gère le dispositif. Les jeunes qui ont activé leur Pass en 2019 pourront l’utiliser jusqu’à cet été ». Assurant que le Pass est désormais « calibré pour atteindre l’échelle nationale », Damien Cuier vise « un objectif de 700 000 inscrits d’ici à la fin de l’année ». A terme, le nombre d’utilisateurs devrait atteindre 1,3 million.
En cette fin de mandat d’Emmanuel Macron, le ministère de la culture est donc tenu de mener à bien ce « chantier culturel prioritaire du quinquennat » inscrit dans le nouveau « baromètre de l’action publique ».
Rue de Valois, on considère que ce nouveau dispositif peut devenir un « objet de relance » du secteur culturel quand la crise sanitaire sera passée. Problème : la réouverture des lieux de culture et la reprise des festivals seront très certainement soumises à des règles sanitaires qui réduiront les jauges et donc le nombre de places dévolues aux détenteurs du Pass.
Si sa généralisation est actée, reste, aussi, à finaliser son financement. Outre le budget de l’Etat et la participation des offreurs privés, il est désormais question de...
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