Hier auréolée de sa capacité à gagner des arbitrages, la ministre est désormais affaiblie par la baisse brutale des crédits de la Culture. Les secteurs du patrimoine et de la création risquent d’être douloureusement touchés.
MISE À JOUR - Interrogée mardi soir sur les coupes budgétaires dont son ministère fait l’objet lors d’un débat organisé par l’association d’étudiants Dauphine discussion débat, Rachida Dati a brièvement répondu en affirmant que « les arbitrages n’étaient pas encore totalement stabilisés à ce jour » et qu’elle avait pu « récupérer une petite somme ». La ministre de la Culture n’a pas donné plus de précision, impossible donc de savoir s’il s’agit de quelques millions ou de quelques dizaines de millions d’euros. La contestation contre ces coupes claires dans la création, elle, ne faiblit pas. Ce mardi, le Syndicat national des scènes publiques (SNSP) et le Syndicat professionnel des producteurs, festivals, ensembles et diffuseurs indépendants de musique (Profedim) dénoncent dans un communiqué commun « une attaque sans précédent envers le service public des arts et de la représentation ». « Les conséquences pour nos adhérents seront inéluctables », écrivent les deux organisations, « disparitions de structures (équipes, festivals ou lieux), déficits massifs, ralentissement de l’activité, nouvelle contraction du disponible artistique et donc du volume d’emploi ».
La soustraction est salée. Plus de 200 millions d’euros, c’est le montant des annulations de crédit auquel est contraint le ministère de la Culture sur son budget 2024. Cette coupe claire a pour origine la décision du gouvernement d’économiser 10 milliards d’euros, pour compenser les baisses de recettes dues à une croissance de l’économie plus faible que prévu (1 % au lieu de 1,4 %). Tous les ministères sont censés y contribuer à hauteur de ce qu’ils représentent dans le budget national, a expliqué le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire. Une affirmation démentie par les faits.
Au ministère de la Culture, cette réduction touche en priorité le patrimoine (- 100 millions), la création (- 96 millions), le soutien aux politiques mises en place par le ministère (- 9 millions) et les dépenses de personnel (- 3 millions). L’audiovisuel public, qui dépend également du budget de la Culture, n’est pas épargné, avec une baisse de 20 millions d’euros. Enfin, l’action culturelle de la France à l’étranger, qui relève cette fois du ministère des Affaires étrangères, est elle aussi mise à contribution, à hauteur de 28 millions d’euros.
Pour Rachida Dati, la pilule est amère. Dans le monde de la culture, avoir du poids – ce que tout le monde lui prêtait jusqu’à aujourd’hui – se mesure à sa capacité à gagner des arbitrages budgétaires. Dans les faits, elle n’est pas plus épargnée que les autres ministères, tant s’en faut. Et alors que sa prédécesseure pouvait annoncer à l’automne dernier un budget en hausse de 6 % (hors audiovisuel public), il le sera en réalité de moins de 1 %, ce qui revient à devoir composer avec des crédits en baisse, compte tenu de l’inflation.
Arbitrages à la baisse
Tout aussi inquiétant, il semble que cette décision ait été prise, en dehors de toute concertation interministérielle, par le trinôme Élysée, Matignon et Bercy, ce qui en dit long sur la centralisation du pouvoir et le peu de poids des ministres dans le processus décisionnaire.
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