Ils ont marqué le monde du spectacle pendant des décennies, appréciés des artistes et dans le milieu professionnel. Ce sont deux figures qui se sont éteints. Les hommages se sont multipliés.
Ils ont en commun non seulement d'avoir un prénom composé et un patronyme qui est un prénom, mais surtout d'avoir été deux hommes de passion et d'avoir marqué le monde du spectacle.
Atteint de la Covid-19 au printemps, Jean-Pierre Vincent a été ensuite hospitalisé après avoir subi un AVC. Le compagnon d'armes de Patrice Chéreau est décédé le 4 novembre, à l’âge de 78 ans.
Jean-Pierre Vincent n’a pas seulement signé une centaine de spectacles et dirigé successivement le Théâtre national de Strasbourg (TNS), la Comédie-Française et les Amandiers, à Nanterre (Hauts-de-Seine). Il était toujours le premier à monter au front pour défendre le modèle du théâtre public à la française, qu’il estimait aujourd’hui menacé, et le rôle fondamental qu’il joue dans une société démocratique.
« Avec Ariane Mnouchkine et Patrice Chéreau, il représentait une génération théâtrale qui a ouvert au monde des classiques trop longtemps engoncés dans un immobilisme poussiéreux», a réagi l'ancien ministre de la Culture Jack Lang à l'annonce du décès du metteur en scène. Autre réaction d’une ancienne ministre de la Culture, Aurélie Filippetti : « Jean-Pierre Vincent était de ces grands noms du théâtre qui éclairaient les textes à la lumière de la scène, généreux dans sa lecture des classiques, soucieux de transmettre sa passion du théâtre et de la littérature. »
« Il est associé à l’Histoire du Festival d’Avignon, même s’il en avait refusé la direction lorsqu’elle lui a été proposée, je l’ai d’ailleurs souvent charrié là-dessus", a confié, dans le quotidien La Provence, Olivier Py, à la tête du grand rendez-vous du théâtre et du spectacle vivant. « Jean-Pierre Vincent n’imaginait pas sa vie autrement que dans un théâtre. Il avait une grande habileté, un sens de la formule, du timing politique, il a rendu de grands services à la profession. »
« Peu d'hommes ont été à ce point des visionnaires et des grands Monsieurs", a réagi dans un communiqué le Théâtre du Gymnase qui a accueilli nombre de ses pièces. C'était un "maître du théâtre français, excellent pédagogue et brillant directeur d'acteurs », ajoute le théâtre.
Parmi les autres réactions, la MC93 (maison de la culture de Seine-Saint-Denis Bobigny) a salué « un grand Monsieur du théâtre français, quelqu'un qui a toujours été attentif à transmettre ».
De nombreux metteurs en scène, comédiens et comédiennes lui ont également rendu hommage, comme Stanislas Nordey, le directeur du Théâtre national de Strasbourg, sur Sceneweb : « On n’en n’a pas plusieurs des pères de théâtre. Il m’a mis le pied à l’étrier, il m’a appris tout ce qu’est le théâtre public, il m’a initié au théâtre contemporain. Je lui dois beaucoup. Et puis c’était un pédagogue extraordinaire qui savait emmener très loin les jeunes acteurs ».
Autre pionnier engagé, Jean-Michel Boris est lui aussi décédé, des suites de la Covid-19 selon le quotidien régional l’Est Eclair. C'est une authentique figure du music-hall parisien qui vient de nous quitter. La cheville ouvrière de l'Olympia et le bras droit de Bruno Coquatrix (1910-1979) est parti le 6 novembre à l’âge de 87 ans.
L’homme, qui était resté actif dans le milieu jusqu’à la fin, était très apprécié des artistes et du milieu musical. Pour lui, aussi, les hommages – unanimes – se sont aussi multiplié ces jours derniers.
L'Olympia a réagi sur Twitter: « Avec la disparition de Jean-Michel Boris, nous perdons l'un de nos pères et le monde de la culture, l'un de ses bienfaiteurs. Son nom restera à jamais associé à l'histoire de l'Olympia et pour toujours dans nos cœurs. Lui qui a incarné la salle pendant un demi-siècle. »
Le comédien Smaïn a salué « un homme remarquable ». « Je lui dois mon premier Olympia, je lui dois cette part de rêve qu'il m'a si gentiment offert. Merci à toi Jean-Michel, après ce rideau rouge voici ce long tapis rouge qui te conduit dorénavant vers le Paradis».
«Ce monsieur était un seigneur», a également écrit le comédien François Morel sur les réseaux sociaux.
L’Adami a, elle, rendu cet hommage : « Jean-Michel Boris s’en va alors que les salles de concerts sont contraintes au silence. Quelle triste ironie pour celui qui a tant œuvré pour la musique sur scène. Les artistes n’auront jamais assez de remerciements à apporter à ce monument de notre profession. »
Nombre d’artistes et de producteurs n’ont pas manqué de diffuser de leur côté des messages de sympathies, comme, à titre d’exemple, le chanteur « M » : « Jean-Michel Boris fait partie ces grandes âmes du monde du spectacle. Il a toujours été là pour moi avec la même écoute, la même humilité. Il m’a inspiré, souvent ému. Il va nous manquer. »
Antoine Blondel