Malgré 363 millions d’aides versées depuis le début de la pandémie de Covid-19, le secteur redoute des faillites et ne parvient pas à reprendre une activité viable.
Un sentiment d’incertitude totale et des protestations en série, en dépit d’une manne de 220 millions d’euros promise par le gouvernement. Près de 400 entrepreneurs (exploitants de salles, producteurs de tournées, organisateurs de festivals…), réunis lundi 21 septembre salle Pleyel, à Paris, pour l’assemblée générale du Prodiss, la première organisation patronale du spectacle musical privé, ont exprimé leur malaise. Trois artistes ont volé à leur secours : Patrick Bruel, Christophe Maé et Akhenaton, qui a jugé les aides de l’Etat « intéressantes », mais « insuffisantes ».
« Le secteur est à l’arrêt depuis plus de six mois », constate d’emblée Olivier Darbois, président du Prodiss. S’il qualifie les aides gouvernementales de « bonne nouvelle », il ajoute : « Encore faut-il être vivants dans six, neuf, douze mois », dans la mesure où « une entreprise sur deux du secteur risque la faillite d’ici à la fin de l’année ».
Selon une étude du Prodiss rendue publique lundi, « 76 % des dates de concert prévues entre septembre et décembre 2020 ont été annulées ou reportées ». Le monde des concerts reste à la peine. Ce qui empêche la reprise ? « L’évolution du zonage », qui constitue le principal problème. Depuis le 10 juillet, les salles de concert ne peuvent accueillir plus de 5 000 spectateurs – nécessairement assis et masqués – dans les départements classés verts. S’ajoute à cela une distanciation physique obligatoire (un fauteuil sur deux occupé) dans les zones rouges. Impossible d’anticiper une tournée puisque les départements peuvent être classés rouges du jour au lendemain. De plus, l’interdiction des concerts debout demeure un autre handicap majeur car ils concernent la moitié des spectacles.
Ainsi, rentabiliser une salle relève de la gageure. « Il n’y a qu’une chose à faire : reprendre les concerts sans laisser libre un fauteuil sur deux », suggère Pierre-Alexandre Vertadier, président de Décibels Productions. Surtout que des milliers de jeunes s’agglutinent sans masque dans des bars musicaux le long de la Seine, à Paris, s’agace-t-il. Olivier Darbois fustige aussi cette « disparité de traitement ». Jean-Noël Tronc, directeur général de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem), juge « surréalistes ces mesures de distanciation aussi strictes imposées dans les salles de concert, mais pas dans les avions, les trains, les métros ni les tramways ».
« Engager la relance »
Consciente des « menaces mortelles qui pèsent sur le secteur privé », Sylviane Tarsot-Gillery, directrice générale de la création artistique du ministère de la culture, qui représente Roselyne Bachelot, l’assure : « Ma priorité consiste à vous donner les moyens de reprendre votre travail. » Elle promet de plaider en faveur d’une exonération de charges sociales jusqu’à fin 2020. Pour ce qui est des fauteuils vacants, elle déclare que la Rue de Valois doit se plier aux règles sanitaires édictées par la Haute Autorité de santé.
De son côté, Jean-Philippe Thiellay, président du Centre national de la musique (CNM), se veut à l’écoute de cette profession laminée, qui prévoit une chute de son chiffre d’affaires de 84 % en 2020 (à 350 millions d’euros) et 176 millions d’euros de pertes nettes. Depuis le début de la crise sanitaire, le CNM a déjà versé 103 millions d’euros d’aides d’urgence. Le gouvernement a annoncé, le 28 août, 220 millions d’euros supplémentaires pour sauver le spectacle vivant privé. Sur le montant total du fonds destiné à compenser le manque à gagner dû à la restriction de jauge, 40 millions iront aux salles de concert.
Cette manne sera entièrement gérée par le CNM et destinée à « éviter les faillites et engager la relance », précise M. Thiellay. Une première tranche de 170 millions sera distribuée...
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