La décision du gouvernement fédéral belge de fermer les théâtres, cinémas et salles de spectacles pour juguler la progression du variant Omicron est vivement contestée.
Ils sont environ 5 000 à avoir bravé la pluie, dimanche 26 décembre, pour protester contre la décision du gouvernement fédéral belge, prise mercredi 22 décembre, de fermer les lieux culturels afin d’enrayer la progression du variant Omicron. « C’est l’humiliation de trop, déclare Annie Bozzini, directrice de Charleroi Danse. Nous avons fait des efforts et suivi toutes les mesures précédentes. C’est injuste, infondé et arbitraire. »
Au cœur de Bruxelles, la foule grouille au pied du Mont des Arts, rebaptisé pour l’occasion « Mort des arts ». Le troisième confinement du secteur culturel est vécu comme un « coup de massue », alors que le précédent s’était étalé sur sept mois. « Nous travaillons avec des systèmes de contrôle adaptés aux infrastructures et évolutifs en fonction de la situation sanitaire. Nous avons élaboré ces protocoles avec des virologues. Cette décision est illogique », explique, au Monde, Peter de Caluwe, directeur du Théâtre royal de La Monnaie. Le secteur de la culture a réduit ses jauges, installé des systèmes de ventilation, appliqué le passe sanitaire.
Les éléments statistiques en possession de Sciensano, l’institut scientifique de santé publique, tendent à prouver que les salles de théâtre ou de cinéma sont en queue de peloton des lieux de contamination. « On nous ferme pour éviter de fermer d’autres secteurs », regrette Pierre Thys, directeur du Théâtre national. Les acteurs du secteur culturel ne comprennent pas pourquoi les bars, restaurants, cafés, et même les salles de sport resteront ouverts alors qu’eux se voient contraints de fermer leurs portes à partir du 26 décembre pour une durée indéterminée.
Ces fermetures n’étaient d’ailleurs pas recommandées, à ce stade, par le groupe d’experts de stratégie de crise pour le Covid-19, composé de virologues, d’infectiologues, de biostatisticiens. « Aujourd’hui, c’est comme si on associait la culture et la maladie », déplore Sophie Lauwers, directrice générale du Palais des beaux-arts de Bruxelles. Le camouflet est si brutal que la décision de la coalition gouvernementale, dirigée par le premier ministre Alexander De Croo (libéral flamand du VLD), parvient à rassembler, contre elle, les secteurs culturels flamands et francophones, unis pour l’occasion.
Une « désobéissance pacifique »
Le premier ministre a justifié la décision de son gouvernement par les conséquences attendues de la circulation du variant Omicron dans un contexte où les hôpitaux sont déjà en surchauffe. Mais sa décision ne passe pas. Selon le dernier bulletin épidémiologique de Sciensano, le nombre de cas confirmés et d’admissions à l’hôpital était en baisse samedi 25 décembre. De vives critiques ont été émises, jeudi 23 décembre, à la chambre des représentants, par des parlementaires de l’opposition et de la majorité. Des députés écologistes, socialistes, libéraux et chrétiens-démocrates flamands, dont les partis sont membres de la coalition au pouvoir, ont demandé que cette décision soit reconsidérée.
A Bruxelles et en Wallonie, 83 théâtres, cinémas et centres culturels ont annoncé qu’ils garderaient leurs portes ouvertes. Une « désobéissance pacifique » entendait-on dans les rangs des manifestants. La ministre francophone de la culture, Bénédicte Linard (écologiste), a d’ores et déjà affirmé qu’elle n’appliquerait pas de sanctions aux récalcitrants. Le collège des procureurs généraux, quant à lui, a fait savoir que la recherche et la poursuite des infractions ne seraient pas une priorité.
C’est aussi sur le terrain judiciaire que les manifestants contre-attaquent. Plusieurs organisations, dont la Fédération des employeurs des arts de la scène et la Ligue des droits humains, contestent la mesure devant le Conseil d’Etat et introduiront, lundi 27 décembre, une demande de suspension en extrême urgence devant le tribunal de première instance.
Dans la foule, Liam, un jeune technicien vidéo et lumière de 25 ans, s’inquiète pour son avenir. « Vu qu’il n’y a pas de perspective, je n’ai pas de...
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