Depuis ce week-end sur Medici TV, bientôt en direct de la Philharmonie de Paris et de Radio France : les musiciens retournent au plateau devant les caméras. Les salles sont vides, leurs poches le resteront parfois.
Ce fut le lien musical de nos longues semaines de confinement, ce sera celui des mois d'incertitude avant que les portes des auditoriums rouvrent au public. Le concert filmé, et retransmis en direct ou en différé par les plateformes de streaming, les réseaux sociaux, voire les chaînes de télévision, quitte l'appartement ou le jardin des artistes et retourne à la scène. Capté à domicile, il nous lègue une kyrielle d'images auxquelles on reviendra avec émotion, séquences souvent touchantes, parfois drôles, voire virtuoses quand elles convoquaient plusieurs artistes depuis divers lieux, en polyphonie instrumentale ou vocale. Acte de résistance face au silence et à la peur, cri d'amour à l'art et à nos frères humains lancé depuis les balcons de la planète. Chacun y aura cueilli de quoi fleurir son jardin secret - du violon de Renaud Capuçon au Boléro héroïque de l'Orchestre National de France, de la monodie médiévale du baryton Marc Mauillon aux créations commandées par le chœur des Cris de Paris afin d'être chantées via l'application Zoom, pour s'en tenir à quelques images vues chez nous.
Main levée à titre gracieux, bien entendu, même si certains ensembles auraient voulu pouvoir payer ces prestations à leurs membres. Le retour sur image suffisait au titre des compensations matérielles. Qui en blâmerait d'ailleurs des artistes privés de leur raison de vivre et, pour ceux qui n'appartiennent pas à une formation permanente, de leurs moyens de subsistance ?
Affiche de rêve
La réouverture progressive des plateaux, sinon des salles, encourage naturellement à maintenir ce lien avec le public par le truchement d'une technologie plus sophistiquée que l'Iphone. Ce samedi 16 mai, Medici TV, leader de la musique en streaming, entamait, à l'initiative de Renaud Capuçon, une série de rendez-vous depuis la Fondation Polignac dont les affiches font saliver : la fratrie Moreau, Justin Taylor, Karine Deshayes, Gérard Caussé, Nicholas Angelich, Le Balcon dirigé par Maxime Pascal, David Kadouch, Elsa Dreisig, Sol Gabetta, Bertrand Chamayou, Alexandre Kantorow, Lucas Debargue, les quatuors Ebène et Hermès...
Le 28 mai, autre grand moment annoncé : les premières notes de musique résonneront à nouveau sur la scène de la Philharmonie de Paris, désertée depuis la mi-mars. Œuvre-symbole au programme, autant que respectueuse de la sécurité sanitaire avec son effectif de cordes, les Métamorphoses de Strauss, suggérées là aussi par Renaud Capuçon, aux côtés duquel on retrouvera Gérard Caussé, Raphaëlle, David et Edgard Moreau, mais aussi Nicolas Dautricourt, Victor-Julien Laferrière, Anne Gastinel... Un casting alla Lucerne, devant une salle vide à l'exception de quelques grands donateurs, mais que nous serons des dizaines de milliers, espérons-le, à suivre sur Arte Live Web et le site de la Philharmonie. Et Radio France prépare pour juin ses propres retransmissions musicales, sur lesquelles nous reviendrons bientôt.
Organisations en alerte
Mais quelles recettes pour ces opérations montées en quelques jours à coup d'énergie et de débrouillardise, et donc quels moyens pour rémunérer les artistes ? Pour les musiciens permanents, ces concerts se substituent à l'activité annulée et sont couverts par les salaires maintenus grâce aux subventions. Avec les indépendants, la tentation peut exister de faire financer par l'assurance chômage, via le régime de l'intermittence, une prestation que le musicien sera encouragé à céder bénévolement afin de bénéficier de la promotion offerte. Les organisations professionnelles sont en alerte face à ce risque, devant la multiplication des projets « streaming en huis-clos ». Celles de salariés, bien entendu. Mais aussi celles...
Lire la suite sur diapasonmag.fr