Les professionnels accueillent favorablement les dates des 2 et 22 juin mais demandent des aides financières. Et s’inquiètent des conditions d’accueil du public.
Le premier ministre avait à peine terminé son discours que, déjà, le distributeur Carlotta Films publiait ce communiqué : « Ça y est ! Nous l’attendions, vous l’attendiez, avec énormément d’impatience, les salles vont pouvoir rouvrir. Quelle bonne nouvelle ! » La date du 22 juin, jour fixé par Edouard Philippe (en réalité le 24, les sorties de films ayant lieu le mercredi en France), a en effet créé la surprise dans le milieu du cinéma, où personne ne s’attendait à une date aussi proche, pas même la puissante Fédération nationale des cinémas français (FNCF), qui regroupe l’ensemble des quelque 5 900 salles.
Plusieurs minutes avant la prise de parole du premier ministre, des syndicats de distributeurs de films avaient reçu une information « soi-disant officielle »annonçant la réouverture pour le 8 juillet. Les professionnels font l’hypothèse d’un arbitrage politique : il fallait que les salles rouvrent avant le second tour des municipales, dimanche 28 juin.
Elles ont un peu moins d’un mois pour se préparer, ce qui est jugé un peu court par certains. « Mais on est tous dans les starting-blocks », s’exclame Jocelyn Bouyssy, le patron des cinémas CGR, à la production familiale et populaire (700 écrans, pour la plupart en régions). Pour l’heure, la sortie nationale de deux grosses productions est attendue pour le 22 juillet, Mulan, de l’écurie Disney, réalisé par Niki Caro, ainsi que le film d’espionnage Tenet, de Christopher Nolan. Si la FNCF se félicite du feu vert donné par le premier ministre, elle estime cependant que la reprise ne pourra se faire sans « des aides financières sectorielles essentielles » en soutien au redémarrage de l’activité, suivies d’un « ambitieux plan de relance ».
Pris de court, les exploitants n’ont pas encore validé le casse-tête des jauges et des gestes barrières : faudra-t-il disperser les spectateurs un siège sur deux, un rang sur deux, ou bien les autorités vont-elles préférer fixer un taux de remplissage, à 50 % par exemple ? L’arbitrage devrait intervenir la semaine prochaine.
François Aymé, qui préside l’Association française des cinémas d’art et essai (Afcae, 2 000 écrans), est perplexe. « La fin du mois de juin n’est jamais une bonne période pour le cinéma, c’est même souvent la pire. La question, c’est de savoir si on aura suffisamment de films porteurs, avec une diversité d’œuvres. L’été risque d’être long », dit-il, en rappelant que des films sortis le 11 mars et presque aussitôt déprogrammés retrouveront le chemin des salles à partir du 22 juin, comme La Bonne Epouse, de Martin Provost.
« La balle est dans le camp des distributeurs, et nous demandons au gouvernement de faire un geste pour les inciter à sortir des films durant cette délicate période »,ajoute François Aymé. Le distributeur Etienne Ollagnier (Jour2Fête), coprésident du Syndicat des distributeurs indépendants (SDI), le confirme : « On a demandé au Centre national du cinéma des incitations financières pour sortir les films. »
Clubs de jazz et petites salles
Pour les salles de spectacle et de concerts, c’est également la surprise, teintée de perplexité et d’inquiétude, qui domine. En zone verte, la réouverture pourra se faire dès le 2 juin, en zone orange à partir du 22 de ce même mois. Le port du masque sera obligatoire, et les organisateurs devront veiller à ce que la distanciation physique soit respectée dans les salles. Dans le secteur des musiques dites actuelles, où on ne s’attendait pas à une possibilité de reprise si rapide, les recommandations de sécurité sanitaire sont considérées comme impossibles à mettre en place, sauf à ouvrir au tiers de leurs jauges, à fonds perdu. La mesure ne concernerait que...
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