Ces lieux où les foules sont rares, ont rouvert et espèrent séduire de nouveau les acheteurs.
Mardi 12 mai : c’est le jour de réouverture pour plusieurs galeries d’art parisiennes, officiellement autorisées à recevoir des visiteurs. Première observation : le flacon de gel hydroalcoolique, rose, bleu ou blanc, y occupe la place réservée au bénitier dans les églises, aussitôt la porte passée. Deuxième constatation : il y a des visiteurs. Seuls ou en couple, ils hésitent parfois à entrer et interrogent du seuil celles et ceux qui, masqués, sont à l’accueil. « Nous pensions qu’il n’y aurait personne, avoue le galeriste Georges-Philippe Vallois, mais ça nous faisait du bien d’ouvrir. Et en fait, il y a eu des visiteurs tout l’après-midi. » Même constatation chez Daniel Templon ou Christian Berst. On peut en témoigner : il n’y a pas foule, mais, comme il n’y a jamais foule dans les galeries, en dehors des vernissages et des samedis après-midi, les apparences sont à peu près normales.
On pourrait même croire qu’en raison d’une faille temporelle le 12 mai est le lendemain du 14 mars. Souvenons-nous. Ce jour-là, Daniel Templon ouvrait les expositions du peintre berlinois Norbert Bisky et de l’artiste Billie Zangewa, née au Malawi, qui fait apparaître corps et visages avec des lambeaux de soie. Chez Vincent Sator, la peintre d’origine iranienne Nazanin Pouyandeh présentait ses dernières toiles. Chez Maïa Muller, c’était celles d’un autre berlinois, Fritz Bornstück. La galerie Papillon révélait les travaux récents de Charles Le Hyaric, monde marin où des squelettes de poissons nagent entre des plaques de métaux corrodées par le sel. C’était l’un de ces samedis du Marais où se croisent, se parlent ou s’évitent artistes, collectionneurs et critiques dans des galeries qui sont très proches les unes des autres.
Mais ce samedi-là a fini sur le discours d’Edouard Philippe annonçant « la fermeture effective de tous les lieux publics non indispensables à la vie du pays ». Dans la galerie de Marie-Hélène de La Forest Divonne, les paysages marins de Vincent Bioulès juste arrivés de son atelier montpelliérain n’ont même pas eu le temps d’être accrochés pour le vernissage, prévu le 19 mars – qui n’a jamais eu lieu. Tous les galeristes racontent la même histoire et la même stupeur : dans la semaine, les accrochages se sont déroulés comme prévu, comme les pré-vernissages les 12 et 13 mars et les premières ventes chez Templon ou Sator. « C’est vite devenu bizarre, se souvient Maïa Muller. Il y a d’abord eu quelques visiteurs, puis de moins en moins, puis personne. Une collectionneuse qui revenait de Maastricht m’a dit en riant que là-bas il n’y avait que des malades. » La nouvelle se répand : la foire Tefaf de Maastricht, qui a ouvert le 5 mars, a tourné au cluster. Ses organisateurs et la municipalité de Maastricht l’ont maintenue malgré l’épidémie, résolus à ne pas sacrifier l’une des plus importantes manifestations du marché des arts anciens et modernes. « Résultat, continue Maïa Muller, quelques jours plus tard, j’étais malade, mon compagnon et notre petite fille aussi. » Elle est loin d’être est la seule. Le retour de Maastricht est violent pour beaucoup des galeristes qui...
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