Contraintes depuis un an, en raison de la crise sanitaire, de déplacer leurs représentations, les salles font preuve d’inventivité pour sauver les productions.
En ce moment, les programmateurs ont l’impression d’être des « spectateurs clandestins » : ils assistent aux représentations réservées aux professionnels qui s’enchaînent pendant la journée, dans les théâtres. Les compagnies ont répété, elles sont prêtes et cherchent des dates, des salles. Les programmateurs, eux, se cassent la tête face à cet embouteillage de spectacles qui s’accroît de semaine en semaine. Depuis mars 2020, ils ont passé leur temps à faire et défaire, annuler et reporter, discuter et soutenir les artistes. En un mot : ils se sont adaptés, en attendant que les théâtres rouvrent et que les festivals aient lieu. Au point d’en devenir presque fatalistes : « J’essaye de ne pas trop anticiper, je ne veux pas aller plus vite que le gouvernement ou les scientifiques », reconnaît Didier Juillard, le directeur de la programmation de l’Odéon-Théâtre de l’Europe, à Paris.
« On espère un début d’ouverture pour mi-avril », poursuit-il. Dans ce cas, Le Ciel de Nantes, la nouvelle création de Christophe Honoré, passerait à l’as. Elle était prévue du 19 mars au 16 avril. Même chose pour La Double Inconstance, de Marivaux, mis en scène par Galin Stoev, et annoncé du 30 mars au 24 avril. L’Odéon aurait maintenu ces spectacles s’ils avaient pu être joués au moins deux semaines. Le suivant est La Ménagerie de verre, de Tennessee Williams, avec Isabelle Huppert dirigée par Ivo van Hove, qui a été interrompu en plein vol, une semaine après sa première, le 6 mars 2020. Didier Juillard se veut optimiste pour cette reprise, du 27 avril au 4 juin : « On y croit », affirme-t-il.
Une saison de l’Odéon compte une quinzaine de spectacles. Depuis un an, treize ont été annulés ou reportés. Le choix a été de privilégier les créations, ou les spectacles qui n’avaient pas été vus à Paris. Et de ne pas sacrifier les spectacles étrangers. En jonglant avec les dates, Didier Juillard a réussi à caser en juin Faith, Hope and Charity, du Britannique Alexander Zeldin, initialement prévu en décembre 2020, et, en juillet, Que ta volonté soit Kin, de Sinzo Aanza, mis en scène par le Burkinabé Aristide Tarnagda, qui était annoncé en janvier. L’Odéon fermera donc plus tard. Et il reprendra plus tôt en septembre. C’est l’une des conséquences de cette année particulière : le calendrier de la saison ne devrait plus s’accorder automatiquement à celui du rythme scolaire.
« Augmenter la jauge »
« A la rentrée 2020, explique Didier Juillard, on a présenté deux spectacles adaptés aux normes sanitaires : Le Grand Inquisiteur, conçu par Sylvain Creuzevault, et Iphigénie, mis en scène par Stéphane Braunschweig. Le public a été au rendez-vous, masqué et espacé dans les salles. Quinze jours avant les vacances de Toussaint, on a annoncé une prolongation, pour...
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