Au Théâtre national de la Danse, le dispositif imaginé par Rachid Ouramdane permet aux enfants de milieux défavorisés de s'initier aux pratiques culturelles, entre ateliers artistiques et visites de la capitale.
Pas de trêve estivale au Palais de Chaillot. En ce mois de juillet, tandis que la plupart des théâtres parisiens ont fermé leurs portes pour l'été, un spectacle se prépare dans le studio Maurice-Béjart, au sous-sol de l'établissement. Sur la scène de cette petite salle se meuvent en silence les corps d’Eunice, Marc-Antoine, Noémy, Nolan, Anaïs, Annelle, Annalycka. Au total, ils sont une petite vingtaine, âgés de 14 à 17 ans. Leurs mouvements, d’abord lents, se font plus vifs lorsque la musique démarre. Contrairement aux nombreux artistes qui ont l’habitude de se produire dans le somptueux bâtiment de la place du Trocadéro, les petits danseurs ne sont pas professionnels. Et ils n’envisagent pas non plus de le devenir, en tout cas pas encore.
Pendant une dizaine de jours, cette vingtaine d’adolescents originaire des quartiers prioritaires de la ville de Saint-Denis, en Martinique, a été choisie par des associations d’éducation populaire locales pour participer aux Chaillot Colo. Ces colonies de vacances culturelles, ont été imaginées par le nouveau directeur du Palais de la Danse, Rachid Ouramdane. Elles permettent à des jeunes trop précaires pour partir en vacances de découvrir Paris, la danse, le théâtre à travers différentes activités.
Les adolescents sont invités à vivre au rythme du théâtre. Le matin est dévolu aux ateliers de pratique artistique chaperonnés par de vrais professionnels chargés d’encadrer le séjour. Et l’après-midi est consacré à la découverte de la capitale. L’occasion pour eux qui n'ont jamais mis les pieds à Paris de visiter les jardins du Luxembourg, le musée de l’Homme ou l’avenue de Champs-Élysées. Chaque semaine, un nouveau groupe pose ses valises à Chaillot: des adolescents venus d’Angoulême ont inauguré ce dispositif unique du 10 au 15 juillet.
Donner de la voix
Pour la dernière journée de ce séjour articulé autour «du mouvement et du récit de soi», les adolescents se produisent en spectacle à huis clos. Habillées de grandes jupes colorées - des vêtements traditionnels martiniquais -, les filles se mêlent aux garçons. Les duos entament une danse de couple sur les rythmes joyeux qui s'accélèrent. Depuis les gradins, les animateurs du séjour encouragent les jeunes du regard. Sur scène, ils s'interrompent à intervalles réguliers pour prendre la parole, un à un, et poser une question qu'ils n'ont jamais osé formuler à haute voix. Les mots fusent, parfois simples, parfois vertigineux. «Quel âge as-tu?», demande l'un. «Est-ce que je peux te tuer?», murmure un autre. «Pourquoi elle et pas moi?», interroge un troisième. Lorsque le spectacle s'achève, tous les petits danseurs se relèvent dans de grandes effusions de joies. Depuis les couloirs du palais, on entend leurs grands cris exaltés résonner.
«Plus que la danse, le plus important pour nous était de...
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