Arnaud Laporte s'entretient aujourd’hui avec la chorégraphe Mathilde Monnier, qui faisait partie des 12 artistes qui ont échangé la semaine dernière avec le président de la République pour faire part de leurs inquiétudes, de leurs souhaits concernant le monde de l'art et de la culture.
Mathilde Monnier a dirigé pendant une vingtaine d'années le Centre chorégraphique national de Montpellier, puis, pendant cinq ans, le Centre National de la Danse, dont elle a quitté la direction en juin 2019 pour retrouver une forme de liberté, une liberté aujourd’hui mise à mal par la crise sanitaire mondiale.
Aujourd’hui, Arnaud Laporte, producteur de La Dispute et des Masterclasses, donne la parole à Mathilde Monnier, qui partage son désarroi, son espoir et son incertitude sur les temps à venir.
Je ne sais pas si le Président Macron vous l'a demandé, mais à quoi pensez-vous ?
Mathilde Monnier : Le président ne nous l'a pas demandé. Cela aurait peut-être été bien qu'il nous le demande. Aujourd'hui, je pense à tout ce qui m'a manqué. Je pense à tout ce qui n’a pas eu lieu. Bien sûr, les spectacles, les annulations, puisque le premier jour du confinement, c'était le premier jour d'une grande tournée que je devais entreprendre, pendant cinq mois. Et puis je pense aussi à un texte de la dernière pièce que j'ai faite avec La Ribot et Tiago Rodrigues, où je raconte l'histoire d'un manège qui tourne beaucoup trop vite, qui s'accélère et dans lequel, à un moment donné, je tombe dans le sous-sol. Et là, il y a un rat qui nous attend pour nous dévorer lentement. J'ai l'impression parfois que le réel a rattrapé la fiction.
Est ce qu'il y a des choses que vous avez décidé de ne plus faire ?
Je ne suis pas sûr d'avoir pris beaucoup de décisions en fait. Je trouve déjà bien d'être là, d'être en forme, d'être en vie. J'apprécie plutôt le temps présent et le moment, la journée, la qualité de la vie. Et je n'ai pas du tout envie d'être volontaire, d'avoir une emprise sur le présent. Tout est tellement incertain que, de toute façon, aucune décision ne peut être sûre. Alors j'attends, tout simplement.
Attendez-vous quelque chose des autres ?
Je n'attends pas vraiment grand chose. J'oscille un peu entre l'espoir et la dépression. Un espoir que, peut-être, les choses vont changer. Et puis, en même temps, une sorte d'attitude assez réaliste qui me dit que non, finalement, je crois que les choses vont recommencer comme avant. Peut-être, quand même, que ce que j'attendrai c'est une société qui prenne un peu plus souci les uns des autres, ce que Martine Aubry appelait la société du « care », une réponse que je trouvais un peu...
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