
Co-directeur de l'Observatoire des politiques culturelles (OPC), Vincent Guillon analyse les impacts en cascade des réductions budgétaires que subit la culture. Il décrypte aussi le sens des prises de position de certains élus à l'égard des politiques culturelles en général, et du soutien au spectacle vivant, en particulier.
Comment analysez-vous la situation financière de la culture ?
Il est encore difficile d’avoir une vue d’ensemble. On s’achemine vers des configurations territoriales assez hétérogènes : certaines beaucoup plus défavorables que d’autres.
Cela dit, on voit bien que les votes en cours des budgets sont loin d’être favorables à la culture. Certaines régions, comme les Pays de la Loire, annoncent des réductions très importantes. Du côté des départements, une partie d’entre eux envisagerait des coupes allant jusqu’à 50%. Quant au niveau du bloc local – principal contributeur de la culture – la situation est très contrastée, entre baisses significatives et relative stabilité.
Tous les secteurs seront-ils impactés de la même façon ?
Le monde du spectacle a de bonnes raisons de s’inquiéter, bien plus que celui du patrimoine, par exemple. Le service public du spectacle vivant dépend beaucoup des dépenses de fonctionnement des collectivités. Notre baromètre annuel montre d’ailleurs que lorsqu’il y a des baisses de crédits, elles concernent en premier lieu ce secteur, qui est, de surcroît, fragilisé depuis plusieurs exercices budgétaires. Il y a eu une accumulation de crises : baisse des recettes de billetterie au sortir de la période « covid », inflation qui a effacé les gains d’aides publiques, crise de l’énergie… Si, en plus, des baisses drastiques de subventions viennent s’ajouter, la situation deviendra intenable.
Quelles peuvent être, à court terme, les conséquences des baisses de subventions ?
On peut s’attendre à des exercices 2025 déficitaires. Il est probable que les programmations des établissements soient plus compactes, mais aussi infléchies au niveau des contenus afin de réduire les risques de pertes de recettes en billetterie.
Autre conséquence à redouter : une exacerbation de la concurrence entre acteurs artistiques et culturels dans l’accès aux ressources publiques devenues moins importantes. Or un renforcement de la concurrence se ferait au détriment de la coopération, qui est pourtant encore plus nécessaire en période de crise budgétaire. Les coproductions dans le spectacle vivant, elles aussi, pourraient encore baisser, ce qui impacterait directement les compagnies. Certains investissements pourraient aussi être ajournés : par exemple les mises aux normes écologiques.
D’une façon générale, on peut redouter un repli excessif sur l’artistique, jugé prioritaire, au détriment des missions civiques, sociales et éducatives. Ce qui n’est pas sans risques pour l’avenir, car c’est justement sur ces dernières missions que reposent en grande partie la justification et la légitimité politique du soutien aux établissements culturels, de même que les dynamiques de renouvellement de leurs actions et de leurs publics.
Qu’en est-il de l’emploi ?
Les premiers touchés seront certainement les emplois artistiques non permanents. Mais ils ne sont pas les seuls concernés.
Une baisse des ressources humaines pourrait avoir pour conséquence un affaiblissement des capacités des structures à...
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