EXCLU – Emmanuel Macron ne renouvellera pas son mandat. Une décision surprenante qui interroge tant son bilan est impressionnant. Éléments de réponse et analyse des enjeux avec le futur ex-président du CNM.
Jean-Philippe Thiellay n’a laissé à personne d’autre le soin d’annoncer son départ de la présidence du Centre national de la musique (CNM) le 31 janvier dans un long post mis en ligne sur le réseau social LinkedIn. Les dizaines de réactions témoignent toutes de la surprise à cette annonce et soulignent son bilan « impressionnant » à la tête du CNM, qu’il a su imposer en cinq ans comme un opérateur public incontournable dans le monde de la musique. « Il a objectivement beaucoup fait pour le CNM dans cette première phase, reconnaît-on en haut lieu, mais il est apparu à l’Élysée, à Matignon et au ministère de la Culture qu’il y avait besoin d’un nouvel élan et donc d’une nouvelle incarnation pour la suite. » Une appréciation discutable, comme l’est cette latitude laissée au président de la République de nommer des dizaines de responsables d’établissements publics dans le secteur de la culture.
Jean-Philippe Thiellay va désormais réintégrer son corps d’origine, le Conseil d’État, en attendant une autre affectation. S’il reste prudent pour commenter son « départ », il défend avec vigueur le rôle et l’efficacité du CNM, l’importance d’une politique publique dans le domaine de la musique ; et dénonce tous ceux qui prétendent l’affaiblir par intérêt, manque de clairvoyance ou idéologie.
Quand et comment avez-vous appris que vous ne seriez pas renouvelé pour un deuxième mandat à la présidence du Centre national de la musique ?
Mon mandat s’est terminé le 31 décembre 2024. Le ministère de la Culture m’a demandé de rester quelque temps de plus. La semaine dernière, j’ai été prévenu que le président de la République ne le renouvellerait pas. J’ai alors fixé mon départ au 31 janvier.
"J’ai fait cinq ans, c’est raisonnablement long […] Je n’ai aucun sentiment d’inachevé."
Quelles raisons vous a-t-on données pour expliquer ce qui ressemble à une éviction ?
Ce n’est pas une éviction. Les directeurs d’administration centrale ou les présidents d’établissements publics peuvent être remerciés. Là, ce n’est pas le cas, il s’agit d’un mandat qui n’est pas renouvelé. On ne m’a pas avancé de raison particulière à ce non-renouvellement, si ce n’est celle de donner une nouvelle impulsion.
De votre côté, comment analysez-vous cette décision ?
Honnêtement, je ne l’analyse pas vraiment. En France, le pouvoir de nomination des dirigeants publics appartient presque entièrement au président de la République. C’est le jeu. Il n’y a pas de droit à être reconduit. J’ai fait cinq ans, c’est raisonnablement long. Quand vous partez au bout de deux ou trois ans, vous pouvez avoir un sentiment de frustration. Là, je n’ai aucun sentiment d’inachevé. J’ai toujours eu une grande ambition pour le CNM et nous avons fait énormément de choses. Il a désormais trouvé sa place, et ce qui m’intéresse, c’est ce qu’il pourra devenir ou pas.
Comment le CNM s’est-il imposé aussi rapidement alors qu’il a fallu quarante ans pour créer un opérateur de ce type ?
La crise liée à l’épidémie de Covid nous a aidés. Elle nous a d’emblée positionnés comme l’opérateur de l’État et, grâce aux arbitrages gagnés par le ministère de la Culture, nous disposions d’un argent considérable – 470 millions – à distribuer à toutes les structures du secteur. Cela a créé une forme de maison commune. Pour autant, tout n’est pas réglé et deux questions fondamentales restent ouvertes. Toute la filière musicale continue-t-elle à vouloir cet outil de politique publique ? Le ministère de la Culture va-t-il un jour adapter ses pratiques en lien avec l’existence de ce nouvel opérateur ?
Et quelles réponses apportez-vous à ces questions ?
Je crois profondément à l’utilité du CNM et je pense que la profession est demandeuse d’un opérateur de ce type. Pour autant, il existe des conservatismes, des tendances centrifuges. J’ai entendu des patrons de majors me dire : « Un projet de disque qui ne se vend pas, c’est un projet qui n’aurait pas dû exister. » Il y a donc une lecture parfois différente de ce que doit être la création et la diversité culturelle. Une grande majorité d’acteurs dans la musique live comme dans la musique enregistrée pensent...
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