Cécile Backès est metteure en scène et directrice de la Comédie de Béthune (62).
Parcours, visions, souvenirs... Jusqu'à fin avril, Culturelink vous invite à découvrir 50 professionnels en vue dans le monde du spectacle.
Depuis quand êtes-vous pro ?
1989.
Après quelles études ?
École du Théâtre National de Chaillot avec Antoine Vitez, et un parcours d’études théâtrales à Censier-Paris 3.
Votre premier poste ?
Comédienne, d’abord sur différents projets, puis permanente artistique au Théâtre de la Manufacture à Nancy, avec Charles Tordjman, entre 1994 et 1997.
Trois artistes que vous adorez ?
Virginie Despentes, Phia Ménard, Pascal Rambert.
Un spectacle qui vous a profondément marquée ?
Nelken, de Pina Bausch, j’avais dix-huit ans. J’ai été éblouie par cette liberté de style entre théâtre et danse. Par la puissance de ce groupe. Par ces êtres profondément poétiques, cette grande et longue femme qui jouait de l’accordéon torse nu, cet homme qui signait « The Man I love », ces hommes dansant en robe longue ouverte dans le dos, et ces oeillets écrasés par leurs pas, au fur et à mesure. Impossible de sortir intacte de Nelken ou d’autres spectacles de Pina Bausch, chacun d’entre eux proposait un long voyage au coeur de ses désirs, de sa pudeur et de sa violence.
Trois professionnels qui ont marqué votre parcours ?
Antoine Vitez pour la liberté qu’il enseignait, « tracez votre chemin vous-même, vous seul.e savez ce que vous êtes et ferez ».
Michel Vinaver, que j’ai rencontré à la fac, immense auteur, immense lecteur, immense passeur d’écritures théâtrales et de pensée sur l’art.
Et Jean-Paul Angot, aujourd’hui directeur de la MC2: Grenoble, qui m’a guidée vers la mise en scène et transmis le goût pour la direction d’un lieu.
Si vous n’aviez qu’un seul lieu de spectacle à conseiller ?
Théâtre Ouvert, à Paris, un lieu important des écritures contemporaines où tous les formats sont possibles. J’y ai beaucoup de souvenirs, de spectacles, de lectures, de belles rencontres et de fêtes.
Si vous n’aviez qu’un seul festival à conseiller ?
Théâtre en mai, à Dijon.
Et la Mousson d’Eté, que j’ai fondée avec Michel Didym et quelques autres au début des années 90 à l’Abbaye des Prémontrés (Pont-à-Mousson, 54), que nous avons pensée comme une fête de l’écriture, jour et nuit.
Que détestez-vous par-dessus tout chez les professionnels ?
La parole non tenue.
Votre meilleur souvenir de professionnel ?
Requiem, de Hanokh Levin, dont nous avons présenté ma mise en scène à Tel-Aviv au Cameri, le théâtre créé et dirigé par Levin lui-même. Sensation rare d’être au rendez-vous avec un être disparu.
Votre pire souvenir de professionnel ?
Trop tôt pour en parler.
Trois adjectifs pour qualifier la filière culturelle aujourd’hui ?
Créative, mais peut-être pas assez ouverte sur l’Europe et l’international.
Pas assez de soutien aux équipes artistiques, aux démarches d’implantation et d’expérimentation sur les territoires.
Et la question de l’égalité femmes-hommes qui avance lentement.
Qu’avez-vous réussi de mieux dans votre vie ?
Mon enfant.
Vos passions (hors art et culture) ?
Les jardins, les fleurs, l’histoire, la poésie, fabriquer des bijoux et des vêtements. Voyager.
L’autre métier que vous auriez aimé exercer ?
Gynécologue obstétricienne — pour voir naître des enfants — ou historienne.
Un conseil à ceux qui débutent dans la filière ?
Penser son parcours dans la durée. S’imaginer dans 10, 15 ou 20 ans.
Propos recueillis par Agnès Lucas