Les programmes culturels des candidats à l’élection présidentielle réservent quelques surprises. Les plus engagés ne sont pas nécessairement ceux qu’on attendait. Certains se focalisent sur quelques thématiques, laissant des pans entiers de culture en jachère. D’autres risquent des promesses chiffrées. Revue de détails.
« La crise sanitaire est venue montrer, s’il en était besoin, l’appétit culturel des Français », observe l’écologiste Yannick Jadot pour introduire le volet culturel de son programme électoral. Pour autant, la culture ne perce pas dans les discours prononcés dans les meetings ou dans les joutes électorales radiotélévisées. Ce qui ne veut pas dire qu’elle soit absente des programmes. Loin s’en faut. Certains ont même une vision relativement détaillée des mesures qu’ils prendraient. Tour d’horizon.
Trois candidats font l’impasse sur la culture
Nathalie Arthaud, Philippe Poutou et Eric Zemmour sont aux abonnés absents en matière de politique culturelle : pas la moindre ligne dans leurs programmes respectifs. Un silence d’autant plus étonnant pour Eric Zemmour, qui se présente comme le chantre de l’identité culturelle de la France et de ses racines patrimoniales.
Quant à Marine Le Pen, autre défenseure de l’identité française, contrairement à sa précédente campagne présidentielle, elle ne parle pas de patrimoine et n’évoque la culture que dans un chapitre consacré au tourisme, secteur où elle veut encourager « la mobilité et la découverte pour les jeunes », notamment à travers « l’aspect culturel » de « la relation aux vacances ».
A l’inverse, le plus disert sur le sujet est Nicolas Dupont-Aignan, qui affiche pas moins de 42 mesures, « pour retrouver l’ambition au service d’une culture populaire de qualité et d’un patrimoine exceptionnel ».
Emmanuel Macron n’a pas encore parlé de ses intentions culturelles à ce stade. Tout au plus mentionne-t-il la culture dans sa lettre de candidature du 4 mars comme un des secteurs clefs que l’impôt permet de financer, au même titre que les autres services publics. Un argument déjà présent, quasi mot pour mot, dans sa Lettre aux Français du 13 janvier 2019 annonçant le grand débat national.
Un grand flou sur les relations Etat-collectivités
La structuration des relations Etat-collectivités fait partie des chevaux de bataille des élus locaux en charge de la culture. Pour autant, ce n’est manifestement pas une préoccupation des candidats. Seuls deux prétendants à l’Elysée la mentionnent, et encore de façon très évasive : Yannick Jadot et Fabien Roussel. Le premier a l’intention de favoriser « la co-construction des politiques publiques » ; le second promet que « la compétence partagée sera reconstruite entre l’État et les collectivités territoriales. »
Seul Yannick Jadot franchirait « une nouvelle étape de décentralisation culturelle », avec « des moyens supplémentaires à destination des territoires, tout en favorisant la co-construction des politiques publiques entre l’Etat, les collectivités territoriales et les acteurs culturels, dont associatifs. »
Valérie Pécresse reprend à son compte les critiques émises par la Cour des comptes en décembre 2021, à savoir « un saupoudrage des aides selon une politique de guichet (…), ce qui rend de moins en moins lisibles les priorités de l’action culturelle de l’État ». Sans plus préciser sa vision du rôle financier de l’Etat.
A contrario Nicolas Dupont-Aignan revendique la « création d’un ministère de la Culture régalien », qui engloberait « le patrimoine, le tourisme, le spectacle vivant, les arts, les lettres, le cinéma et la communication. » La voie à suivre, selon lui, pour « retrouver une authentique ambition pour la culture et de s’en donner les moyens. »
Retour de l’ambition du 1%… mais du PIB
Trois candidats plaident pour une augmentation substantielle des crédits de l’Etat. Jean-Luc Mélenchon et Fabien Roussel prennent pour référence non plus le budget global de l’Etat, mais la richesse produite par le pays : ils porteraient le budget de la culture à 1% du PIB chaque année. « Ce niveau d’engagement financier correspond à une augmentation de l’ordre de 30 % des budgets publics actuels, atteignable en une mandature », calcule Fabien Roussel, qui orienterait cet argent « vers la réduction des inégalités territoriales, en matière d’équipements et de soutien à la création, toutes disciplines confondues. »
Nicolas Dupont-Aignan prend, lui, la référence classique du budget global de l’Etat, dont il voudrait consacrer 1% à la culture. Pour sa part, Yannick Jadot s’engage à débloquer, dans le cadre du plan de relance, un milliard d’euros supplémentaire chaque année pour le ministère de la Culture. Avec l’objectif d’augmenter « la part dédiée à la création à hauteur de 25% du budget global. »
De son côté Jean Lassalle, orienterait les financements publics vers « la création indépendante », sans autre précision. Il créerait par ailleurs un fonds dédié au subventionnement des lieux culturels « qui facilitent l’accès aux plus défavorisés », sans en indiquer le montant.
Enfin, Valérie Pécresse mise sur la réduction de la TVA à 5,5% sur les biens culturels, y compris sur la billetterie des musés et des lieux patrimoniaux. Effet escompté : la réduction du prix du ticket d’entrée.
Education artistique et culturelle : quelques mesures opérationnelles
Fabien Roussel plaide pour un « plan national pour l’éducation artistique à l’école, de la maternelle à l’université », avec son intégration dans les programmes scolaires. Sans plus de détails.
En revanche, Valérie Pécresse et Nicolas Dupont- Aignan ont prévu quelques mesures opérationnelles. La candidate LR veut faire de l’éducation artistique et culturelle une « réalité pour chaque élève » (objectif déjà affiché par le ministère de la Culture depuis 2018). Pour ce faire, chaque établissement scolaire serait jumelé avec une institution culturelle ou lié par un partenariat avec des artistes. « Je veux redonner toute leur vitalité aux clubs de théâtre, de cinéma ou de lecture partout sur le territoire, comme aux concours d’éloquence, aux chorales et aux orchestres scolaires », précise la présidente de la région Ile-de-France.
Quant à Nicolas Dupont-Aignan, il développerait la présence des artistes auprès des publics scolaires en doublant le plafond des heures d’enseignement acceptées par le régime d’assurance chômage (plafond qui est actuellement de 140 heures, et porté à 170 pour les artistes et techniciens de plus de 50 ans).
Patrimoine : du discours le plus évasif aux mesures les plus précises
Valérie Pécresse annoncerait une « mobilisation générale pour le patrimoine », mais omet d’en livrer le volet opérationnel. Même flou chez Anne Hidalgo qui se contente d’avancer l’idée d’une « politique ambitieuse. » Quant à Yannick Jadot, il promet la ratification de la Convention de Faro de 2015 (texte du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine pour la société et assorti d’un « plan d’action » développant une expertise pour les signataires).
Nicolas Dupont-Aignan, le plus...
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