
Après Wajdi Mouawad et Jean Bellorini, le metteur en scène Galin Stoev a annoncé ce jeudi 27 mars son départ du Théâtre de la cité de Toulouse, plus d’un an avant le terme de son mandat, dans l’impossibilité budgétaire de mener à bien ses missions.
Une véritable hémorragie. Un des effets saisissants de la crise profonde qui traverse le secteur public de la culture. Face à un cahier des charges intenable, des budgets qui réduisent comme peaux de chagrin, et des élus locaux pas toujours émus par l’idée même d’un service public de la culture, des directeurs de prestigieuses maisons de théâtre rendent leurs tabliers les uns après les autres. Tous des directeurs qui ont pour singularité d’être aussi metteurs en scène. Quelques semaines après Wajdi Mouawad, qui a annoncé son départ anticipé de la direction du Théâtre national de la Colline le 12 mars, et peu après Jean Bellorini, qui écourte lui aussi son mandat à la direction du Théâtre national populaire de Villeurbanne pour rejoindre la Suisse, c’est au tour de Galin Stoev d’annoncer ce 27 mars son départ du Théâtre de la cité de Toulouse à l’été 2026, soit plus d’un an avant la fin du dernier mandat qu’il devait accomplir.
Cette dernière décennie, on parlait déjà dans le secteur de l’énorme difficulté à attirer des noms prestigieux à la direction de ces maisons. C’est aujourd’hui d’une «fuite» qu’il s’agit. Elle a été lancée entre autres, avec fracas, en décembre 2023 par Stéphane Braunschweig, qui renonçait alors contre toute attente à briguer un autre mandat à la tête de l’Odéon, un des théâtres nationaux directement placés sous tutelle du ministère. A Libération, il disait alors : «Tout le monde reconnaît qu’il y a un problème structurel. Le ministère tout autant qui nous demande de réduire encore les dépenses du théâtre en ordre de marche [les frais de fonctionnement, ndlr]. Ou encore de relever le prix des billets, mais tout en rendant le théâtre accessible aux jeunes et à tous ! Je n’ai pas la clé de l’équation. Il faut inventer un nouveau modèle économique. Mais on ne peut pas le disjoindre d’un projet artistique.»
Faire toujours mieux avec toujours moins
Quelques mois plus tard, à la suite d’une baisse de crédits de 204,3 millions d’euros pour le ministère de la Culture, les établissements nationaux, essentiellement situés à Paris, voyaient leur budget 2024 amputé, de façon à réduire la casse ailleurs. Le 3 avril de cette année-là, invité de la matinale de France Inter, Wajdi Mouawad, directeur du théâtre de la Colline à Paris (un autre Théâtre national sous la coupe directe du ministère), faisait exercice de pédagogie : lorsqu’une baisse budgétaire est actée, ce n’est pas dans la plomberie, dans l’électricité, dans les emplois ou autres frais fixes qu’un théâtre peut couper, «c’est dans les artistes». Son directeur adjoint Arnaud Antolinos embrayait dans nos pages : «Le seul levier qu’il nous reste dans l’urgence [pour équilibrer le budget], c’est la programmation de l’automne 2024.» Si les coupes se pérennisent, expliquait-il, les solutions à trouver devront être structurelles : audit des dépenses, révision de l’activité, réduction du coût de fonctionnement, réduction des équipes (techniciens qui travaillent au quotidien pour une multitude d’artistes non programmés mais accueillis dans des salles de répétitions, concepteurs de décors, chargés d’actions culturelles dans les écoles, les hôpitaux, les prisons). Le 12 mars, Wajdi Mouawad annonçait à son tour son départ anticipé. Il l’expliquait toutefois par le désir de se recentrer sur...
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