
Les artistes auteurs assujettis à l’Agessa n’avaient jamais été prélevés de cotisation à l’assurance vieillesse, en violation du code de la sécurité sociale.
C’était promis, juré, les choses allaient changer. En 2020, le rapport de Bruno Racine, intitulé « L’auteur et l’acte de création », remis au ministre de la culture de l’époque, Franck Riester, avait montré que potentiellement 190 000 auteurs et autrices assujettis à l’Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs (Agessa) avaient été privés de droit à la retraite pour leur activité. En cause : les artistes auteurs n’avaient jamais été prélevés de cotisation à l’assurance vieillesse, en violation du code de la sécurité sociale.
« Les conséquences sociales en sont dramatiques puisque les artistes auteurs concernés, qui, de bonne foi, pouvaient légitimement aspirer à percevoir une pension de retraite à proportion des cotisations qu’ils pensaient avoir versées, se trouvent privés des droits correspondants », y affirmait l’auteur. Pour tenter de remédier à cette situation, un dispositif de rachat des trimestres manquants a été proposé. Cette procédure de régularisation des cotisations arriérées a été prorogée jusqu’au 31 décembre 2027.
Mais, au 31 décembre 2024, selon la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), seules 2 122 demandes de régularisation ont été effectuées et 1 802 finalisées. Soit moins de 1 % des auteurs lésés. Le président de la Sécurité sociale des artistes auteurs (2S2A), le photographe Matthieu Baudeau, et la directrice générale par intérim, Emmanuelle Bensimon-Weiler, ne cachent pas que les délais de réponse sont encore trop longs. Certains auteurs ont déposé leurs dossiers depuis trois ans et restent sans réponse. D’autres n’ont pas voulu faire les démarches car ils avaient égaré des documents vieux de dizaines d’années. Surtout, la plupart n’ont pas les moyens de racheter ces trimestres, un dispositif qui peut s’avérer extrêmement onéreux. D’autres estiment que ces sommes n’interviendront pas dans le calcul des 25 meilleures années prises en compte pour le calcul de leur pension de retraite. Enfin certains ne sont tout simplement pas au courant de ce dispositif.
Par ailleurs, ceux qui ont régularisé leur situation avant le 25 décembre 2021 n’ont pas bénéficié d’une aide mise en place ultérieurement par la 2S2A. En 2024, par exemple, 38 aides d’un montant moyen de 2 460 euros ont été accordées pour le rachat de cotisations d’assurance vieillesse arriérées.
Pas les moyens
Parfois, ces demandes sont portées sur un terrain judiciaire. Dix contentieux ont opposé des artistes auteurs à la 2S2A et sept sont encore en cours. Le dossier le plus emblématique concerne Jean-Marie Le Clézio, Nobel de littérature en 2008. Le tribunal judiciaire de Paris a fait condamner le 20 décembre 2023 la 2S2A (au nom de l’Agessa) pour ne pas avoir transmis à la caisse d’assurance vieillesse ses...
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