La saison avait pourtant bien commencé, dopée par une nouvelle génération innovante aux manettes. Mais les conflits sociaux et leur impact sur les transports ont durement pénalisé le secteur.
Lundi, la 34e Nuit des Molières, mise en scène cette édition par l'auteur à succès Alexis Michalik au Théâtre de Paris et retransmise sur France 3, est un coup de projecteur dont le secteur du théâtre privé a bien besoin. « L'année était pourtant bien partie avant d'être freinée par les conflits sociaux », regrette Sébastien Azzopardi, directeur du Théâtre Michel, nominé aux Molières pour la pièce « Une idée géniale », et du Palais-Royal.
« Même si nos chiffres sont bons, nous souffrons de l'effet grèves, avec un recul de nos ventes de 20 % alors que nous étions sur de très bonnes tendances », confirme Aurélien Binder, à la tête de Fimalac Entertainment, propriétaire de plusieurs scènes - dont la Porte Saint-Martin et La Michodière, nominées respectivement pour « Oublie-moi » et pour « Lorsque l'enfant paraît - et producteur de Starmania , en lice pour le Molière du meilleur spectacle musical.
La province impactée aussi
« La reprise post-Covid était là , depuis septembre, mais les conflits ont entraîné des pertes de 30 à 40 % de billetterie sur des pièces qui avaient bien démarré comme « Le retour de Richard III par le train de 9 h 24 » et que la nomination aux Molières a relancé. En province, en tant que producteurs-tourneurs, nous avons été très impactés, avec les annulations de trains », expliquent Fleur et Thibaud Houdinière, producteurs de l'Atelier Théâtre Actuel et directeurs depuis janvier du Théâtre la Bruyère.
Ils ont même supprimé une date car cela leur aurait coûté plus cher de jouer que de ne pas jouer. Une autre fois, ils ont dû débourser 3.000 euros pour faire revenir une troupe de 11 comédiens de Marseille.
Des formes renouvelées
Pour le président des Molières, Jean-Marc Dumontet , à l'honneur pour « Les Coquettes-Merci Francis » diffusées dans ses salles du Grand Point Virgule et de Bobino, « le théâtre connaît des succès divers en ce moment et pas seulement à cause des grèves. Beaucoup de pièces nominées cette fois-ci renouvellent fortement le genre et donc le public. Il faut aller vers ces formes d'écritures plus rythmées, ou vers des thèmes plus engagés », estime celui qui a aussi fondé le festival Paroles Citoyennes. C'est le cas du trépidant « Bourgeois Gentilhomme » à la Comédie Française , dépoussiéré par le tandem Christian Hecq-Valérie Lesort.
Des recettes qui expliquent le succès du Théâtre des Béliers Parisiens d'Arthur Jugnot, nominé pour « Big Mother », une enquête d'investigation sur fond de démocratie en péril et pour « Les Poupées Persanes », sur l'Iran des années 1970. Ou encore la réussite de Fleur et Thibaud Houdinière, huit fois nominés.
Prise de risque
Eux font partie de cette jeune génération de producteurs indépendants prêts à prendre des risques pour encourager la création. On leur doit nombre de productions proposées d'abord dans leur théâtre d'Avignon, avant d'enchanter la capitale : « Les Chatouilles », « La Machine de Turing », « Adieu Monsieur Haffmann », « Je ne cours pas, je vole » nominé cette édition dans la catégorie Molière du Théâtre Public car programmé au Rond-Point.
« Nous créons près d'une vingtaine de spectacles par an et établissons 5.200 fiches de paie. Avoir nos théâtres à Avignon et Paris nous permet de mettre à l'affiche ce que l'on veut, aussi longtemps qu'on le souhaite. Quand nous avons créé « Les Cavaliers », formidable succès, aucune salle n'en voulait. Notre théâtre La Bruyère, avec ses 335 places, nous offre désormais la jauge parfaite pour lancer nos créations ».
Cette génération de passionnés, souvent enfants de la balle, « fils et filles de » , n'a pas froid aux yeux, de Salomé Lelouch qui dirige le Théâtre Lepic et Matrioshka Productions, à Arthur Jugnot, désormais à la tête des Béliers Parisiens, en passant par Sébastien Azzopardi ou les Houdinière dont les familles dirigeaient déjà une scène. « Mais là où nos aînés privilégiaient les têtes d'affiche aux textes, nous faisons le contraire et aimons dénicher des talents émergents, acteurs, auteurs, metteurs en scène » pointent Fleur et Thibaud Houdinière.
Baisse des budgets municipaux
« D'ailleurs cette année, les nominations pour le Molière du théâtre privé ont en commun de refléter...
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