La 56e édition, du 7 au 30 juillet, après deux années perturbées par le Covid-19, cherche à renouer avec le public.
Pour l’édition 2022 du « off », sur les 1 570 spectacle à l’affiche, plus de 1 000 sont des créations. Ici, une représentation sur l’esplanade devant le Palais des papes à Avignon, en juillet 2021.
Pour l’édition 2022 du « off », sur les 1 570 spectacle à l’affiche, plus de 1 000 sont des créations. Ici, une représentation sur l’esplanade devant le Palais des papes à Avignon, en juillet 2021. THOMAS O’BRIEN
Le Festival « off » d’Avignon renoue avec son gigantisme. Trente-trois mille levers de rideau, 1 570 spectacles, 6 000 artistes, 138 lieux, les chiffres de cette 56e édition, qui se déroulera du 7 au 30 juillet, tordent le cou à deux années perturbées par le Covid-19. Annulé en 2020, organisé en mode dégradé sous contraintes sanitaires en 2021, ce plus grand rassemblement théâtral, en marge du « in », attire cet été plus de mille compagnies.
Pour elles, le « off » agit comme un aimant, un rendez-vous sans équivalent pour montrer leurs créations et espérer une indispensable diffusion. Car professionnels et directeurs de lieux venus de toute la France viennent y faire leur marché. « 25 % de la programmation nationale est issue du “off” », rappelle Harold David, le nouveau coprésident, au côté de Laurent Domingos, de l’association Avignon Festival & Compagnies (AF&C). Ce binôme – le premier est codirecteur de trois salles avignonnaises (l’Atypik, l’Archipel et Le Rouge Gorge), le second est comédien, metteur en scène et directeur artistique de la compagnie Minuit44 – a été élu mi-avril, en remplacement de Sébastien Benedetto, dans une ambiance délétère.
La crise sanitaire n’a pas seulement perturbé le festival mais aussi déclenché une guerre de clans et d’ego au sein d’AF&C, association qui accompagne et supervise le « off », notamment en éditant le catalogue des spectacles proposés. Huissier, assignation au tribunal pour non-respect des statuts, « le conseil d’administration a vécu six mois de cauchemar », témoigne Véronique Boutonnet, de la compagnie Les Ames Libres, et entraîné des démissions.
Vaste marché
Cette guerre intestine a plusieurs origines. D’abord le fonds d’urgence octroyé, à l’été 2020, par le ministère de la culture au « off » d’Avignon, pour atténuer les conséquences de son annulation. Dénonçant l’absence de concertation de l’AF&C et les critères d’attribution des aides (seuls 49 lieux ont pu en bénéficier), des dizaines de salles avignonnaises non permanentes se sont regroupées au sein d’une nouvelle Fédération des théâtres indépendants d’Avignon (FTIA), coprésidée par Harold David.
Ensuite, la volonté affichée de Sébastien Benedetto et de son équipe de proposer un festival « plus apaisé et plus raisonnable », notamment en limitant le nombre de créneaux horaires par salle, a fini de cristalliser les oppositions sur la manière de contrôler ce vaste marché du spectacle vivant. « Réguler le festival, rééquilibrer les risques financiers entre lieux et compagnies, c’était une manière d’assurer l’avenir », défend Sébastien Benedetto.
Les nouveaux présidents d’AF&C jurent désormais que « la discorde ne portait pas vraiment sur les choix mais sur un problème de gouvernance trop verticale ». Sur le fond, Harold David et Laurent Domingos ne remettent pas en cause les chantiers lancés avant eux. Il est toujours question de professionnaliser davantage le festival, d’inciter à l’élaboration d’un « label » de bonnes pratiques pour les salles et les compagnies, et de développer l’accueil d’artistes en résidence afin que de nombreux théâtres ne restent pas fermés onze mois sur douze. « Si des dizaines de compagnies étaient accueillies à l’année, le visage d’Avignon, en devenant une fabrique d’art vivant, changerait hors saison. Cela permettrait aussi de travailler sur les publics du territoire », considère Harold David.
Baisse de la fréquentation
Pour l’heure, l’enjeu de cette 56e édition est justement de renouer avec le public, après une baisse de la fréquentation en 2021. Avant le Covid-19, le « off » attirait près de 300 000 festivaliers, enregistrait environ un million d’entrées (pour une jauge de 3,5 millions de places) et assurait quelque 50 millions de retombées économiques. Mais les études montrent que le public vieillit et peine à se renouveler. Peut-être a-t-il du mal à se retrouver face à une offre pléthorique ? Il y a vingt ans, ce festival accueillait...
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