Les organisations professionnelles du secteur public du spectacle vivant ont réuni le 30 mars à Paris les représentants de cinq des douze candidats à l’élection présidentielle. Objectif : obtenir des précisions sur les intentions des prétendants à l’Elysée. Les réponses des porte-parole ont mis en lumière quatre points, omniprésents dans leurs interventions, notamment sur la compétence culturelle et l'éducation artistique.
L’Union syndicale des employeurs du secteur public du spectacle vivant (USEP-SV) voulait initialement réaliser un film avec les principaux candidats à l’élection présidentielle, pour leur faire préciser leurs intentions en matière de politique en faveur du spectacle vivant.
Pour cause d’aléas des agendas, le projet n’a pas vu le jour. Seules des séquences filmées ont pu être réalisées et mises en ligne avec Anne Hidalgo (PS) et Yannick Jadot (EELV).
En lieu et place d’un film, l’USEP-SV a donc opté pour la formule d’un débat, organisé le 30 mars, à Paris, au Théâtre ouvert (Paris) avec les représentants de cinq candidats à l’élection présidentielle :
- Aurore Bergé, député LREM des Yvelines, pour Emmanuel Macron ;
- Laure Darcos, sénatrice LR de l’Essonne, pour Valérie Pécresse ;
- Frédéric Hocquard, adjoint EELV à la mairie de Paris et soutien de Yannick Jadot ;
- Martin Mendiharat, co-rédacteur du livret Culture de l’Union populaire, le mouvement soutenant Jean-Luc Mélenchon ;
- Alain Hayot, ancien vice-président « culture » de la région PACA, pour le Parti communiste.
Les échanges ont mis en exergue quatre points sur lesquels se dessinent des lignes de partage. En revanche faute de temps, certains thèmes à l’ordre du jour n’ont pas pu être vraiment abordés (transition écologique, égalité femmes-hommes, notamment).
1 – Elargir le périmètre du ministère de la Culture ?
Les détracteurs d’Emmanuel Macron n’ont guère d’évolution majeure à espérer : sa représentante, Aurore Bergé, a indiqué que le président-candidat compte « poursuivre la politique culturelle qui a été la sienne au cours des cinq dernières années. »
La députée des Yvelines dernière plaide pour que la Rue de Valois soit le ministère « des artistes et des publics », et pour que les Drac soient « renforcées », pour doper le « rééquilibrage territorial » de la politique culturelle de l’Etat.
En revanche, plusieurs autres candidats appellent à une recomposition du ministère de la Culture. Alain Hayot (pour Fabien Roussel) a évoqué la nécessité d’un « grand ministère transversal », avec un titulaire ayant rang de ministre d’Etat. Comprendre : un ministère associé aux politiques publiques conduites dans des domaines aussi divers que la santé, le social, la justice etc., et qui aurait voix au chapitre des grands arbitrages financiers.
Une logique transversale à laquelle a souscrit Martin Mendiharat (pour Jean-Luc Mélenchon), qui appelle aussi de ses vœux le « retour d’un ministre qui pèse dans le gouvernement. »
En conséquence, Fabien Roussel et Jean-Luc Mélenchon veulent un budget de la culture « conséquent ». Précisément, la référence serait : 1% du PIB, et non plus 1% du budget de l’Etat. Un nouveau ratio qui permettrait une hausse de 30% des crédits consacrés à la culture.
De son côté, Laure Darcos (pour Valérie Pécresse), a évoqué un budget stabilisé à 4 milliards d’euros. Quant à Yannick Jadot, il augmenterait le budget du ministère d’un milliard d’euros. 25% des crédits dédiés à la culture seraient sanctuarisés pour la création. Cette progression des crédits « culture » permettrait, selon son représentant Frédéric Hocquard, de « mettre les droits culturels dans une dynamique », alors que jusqu’à présent, ils sont sacrifiés au moment où « il faut choisir entre les droits culturels et le reste. »
2 – Faire de la culture une compétence obligatoire ?
Pour Fabien Roussel, la culture ne saurait rester une option « facultative », mais figurer comme « obligatoire » dans le cadre de la logique de « compétence partagée ». Idée à laquelle Jean-Luc Mélenchon serait favorable, a précisé Martin Mendiharat… mais pas Yannick Jadot, selon Frédéric Hocquard. « Que feraient les petites communes qui n’en ont pas les moyens ?, s’est interrogé ce dernier, qui préconise de « simplifier les modes de financements, qui comprennent trop de guichets différents. « Il faut savoir précisément qui finance quoi, et alors on verra ce que peuvent faire les petites communes », a plaidé le représentant du candidat écologiste.
Pour définir les politiques culturelles, Fabien Roussel envisage des états généraux de la culture », réunissant l’ensemble des acteurs de la culture, les artistes, et les « forces vives » (organisations professionnelles et syndicales). Ces états généraux seraient « permanents ». Autrement dit, il s’agirait d’une sorte d’instance de concertation au long cours.
Pour sa part, Yannick Jadot veut « une organisation différente du service public de la culture sur le territoire. » Ce, pour restaurer le lien entre Etat et collectivités, « qu’on est en train de casser », a souligné Frédéric Hocquard. Avec Yannick Jadot, il y aurait donc la mise en place d’une « codécision » des politiques culturelles « y compris avec les organisations professionnelles ». (Dans l’état actuel des choses, les professionnels ne sont pas représentés dans les conseils territoires pour la culture, qui sont le lieu de concertation entre le ministère de la Culture et les élus).
3 – Education artistique et culturelle : comment faire plus ?
Le sujet a surgi dans quasiment toutes les interventions des représentants des candidats, qui tous ont plaidé pour le développement de cette action on ne peut plus fédératrice. La question de son financement est cependant restée floue.
En cas de réélection, Emmanuel Macron envisagerait un « acte 2 ». Il s’agirait « de promouvoir l’inscription [de ces activités] dans chaque parcours scolaire », a précisé Aurore Bergé. Action qui doit commencer « dès l’école. » « C’est aussi un enjeu pour l’avenir des lieux culturels, a souligné la députée LREM, car les jeunes seront les publics et les créateurs de demain. »
De son côté, Laure Darcos (pour Valérie Pécresse) a invité à se méfier de l’objectif du « 100 % EAC », « qui n’est souvent qu’une séance de cinéma dans l’année. » Réserve également émise par Frédéric Hocquard (pour Yannick Jadot).
Laure Darcos a expliqué que l’ambition de la candidate LR vise des projets portés par les établissements scolaires avec des conservatoires et des troupes d’artistes, « via des appels à projets ambitieux et pérennes ». Commencée dès la maternelle, ces activités devront pouvoir concerner tous les âges de la vie.
Selon Frédéric Hocquard (pour Yannick Jadot), le temps scolaire doit faire plus de place aux activités artistiques et culturelles. Une proposition qui recoupe celle de Fabien Roussel, dont le représentant, Alain Hayot, a évoqué « l’abrogation des réformes ‘Blanquer’ qui marginalisent l’EAC. » Pour en « revaloriser les moyens », jusqu’à l’université, le candidat communiste préconise donc le développement des classes à projet artistique, et un « grand plan de recrutement [pour ces activités] », non seulement en milieu scolaire et universitaire, mais aussi dans les divers types d’établissements de soin et de privation de liberté (prisons).
« Il est clair qu’il faut mieux rémunérer les artistes engagés dans l’EAC », a déclaré Laure Darcos (pour Valérie Pécresse). Ce qui passe par « faire sauter le verrou des 507 heures [nombre d’heures ouvrant droit à l’assurance chômage pour les intermittents, ndlr]. »
Martin Mendiharat (pour Jean-Luc Mélenchon) a été plus précis sur la question du financement : s’il était élu, le candidat France insoumise ferait en sorte de « sanctuariser » ces activités en réintégrant les crédits consacrés au pass Culture (quelque 200 millions d’euros) dans la ligne budgétaire de l’EAC.
4 – Quel avenir pour le pass Culture ?
Le pass Culture a été l’objet de...
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