
Programmations rétrécies, emplois supprimés, compagnies menacées de disparaître… Quatre acteurs du spectacle vivant et de la création artistique expliquent l’impact des baisses de subventions régionales.
« Ce que l’on craint le plus, c’est un effondrement à bas bruit du service public de la culture. » Catherine Blondeau, directrice du Grand T, théâtre de Loire-Atlantique, à Nantes, résume ainsi le sentiment qui s’est emparé des acteurs culturels des Pays de la Loire après le coup de tonnerre provoqué par la baisse drastique des subventions régionales.
Le 19 décembre 2024, sous l’impulsion de sa présidente, Christelle Morançais (Horizons), qui s’est targuée de « s’attaquer à un secteur que personne n’osait affronter jusqu’alors », cette région a voté une baisse de 62 % des aides au fonctionnement de quelque 500 lieux, initiatives et projets dans tous les domaines de la culture.
Après la sidération et plusieurs manifestations, l’heure est aux comptes, à l’évaluation des conséquences de ces réductions budgétaires pour les structures, les artistes, mais aussi de ses répercussions sur le public. Programmations rétrécies, emplois supprimés, compagnies qui risquent de disparaître… Pour comprendre ce qui se joue derrière les chiffres et le retrait partiel du financement régional, nous avons interrogé quatre acteurs du spectacle vivant et de la création artistique (trois structures aux statuts différents et une compagnie connue) pour mesurer l’impact, à leur échelle, des choix politiques du conseil régional.
Au Grand T, qui deviendra, dans le courant de la saison 2025-2026, Mixt, un nouvel établissement réunissant Le Grand T et Musique et danse en Loire-Atlantique, la directrice a décidé de proposer à son conseil d’administration une augmentation du prix du billet, passant de 25 euros à 28 euros, et la création d’un nouveau tarif, à 33 euros, pour les « spectacles grand format ». « C’est la seule solution pour reconstituer, en 2026, les 100 000 euros qui manqueront de la région », assure Mme Blondeau, qui a notamment été contrainte de reporter la venue de la nouvelle création du réputé metteur en scène Joël Pommerat, prévue initialement en 2025.
« Nous sommes obligés d’optimiser le ratio entre le prix du spectacle et les recettes. Actuellement, une pièce avec plus de trois comédiens est presque toujours déficitaire. Le risque est de ne plus pouvoir programmer certains spectacles, tel que Le Ciel de Nantes, de Christophe Honoré, que nous avions accueilli en 2022, et de devoir privilégier davantage les petits formats », développe la directrice. A cela s’ajoute « ce que le spectateur ne voit pas » : les actions d’éducation culturelle et artistique, les ateliers pour les lycéens. « Sur toutes ces missions de service public qui ne rapportent pas d’argent, nous sommes contraints de réduire la voilure », se désole-t-elle.
« La casse est énorme »
Aux Quinconces, scène nationale du Mans, qui compte deux salles, de 800 et de 500 places, les engagements pris avec les équipes artistiques sont maintenus jusqu’en juin, mais « nous allons devoir supprimer cinq spectacles sur la saison 2025-2026, ce qui signifie moins de levers de rideau, moins de compagnies produites ou accueillies en résidence. La casse est énorme pour les...
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