Annulés à cause de la pandémie de Covid-19, ces événements, pour lesquels une œuvre est d’abord une certaine somme d’argent et une occasion de spéculation, ont plus généralement du plomb dans l’aile, observe dans sa chronique Philippe Dagen, journaliste au « Monde ».
Chronique. Il y a un an, ce n’était pas une question pour le monde de l’art contemporain. Aujourd’hui, impossible de l’esquiver : le système des foires est-il encore acceptable ? Le 11 mars 2019, le site américain Artnet News diagnostiquait le « peak art fair » : 60 foires en 2000, près de 300 en 2019. L’inflation serait-elle dangereuse ? Combien de foires disparaîtraient, victimes de la concurrence ? Interrogations désormais obsolètes : le 6 avril, sur le même site, le galeriste new-yorkais David Zwirner, star de la profession et grand habitué des foires, annonce que ce monde « va probablement s’effondrer ». Les deux principales sociétés spécialisées dans ces manifestations, Art Basel et Frieze, « s’en sortiront probablement », veut-il croire, mais il s’avoue « a little nervous » – euphémisme poli – pour les autres. Que s’est-il passé ? La pandémie évidemment, mais le mal vient de plus loin.
Brève histoire des foires : la première a lieu à Cologne en 1967, trois ans avant celle de Bâle, devenue par la suite la puissance dominante avec ses filles, Art Basel Miami Beach créée en 2002 et Art Basel Hong Kong en 2013. Deuxième structure concurrente, Frieze Art Fair naît à Londres en 2003 et essaime à New York à partir de 2012 et à Los Angeles en 2019. Entre-temps, le phénomène s’est généralisé en Europe (Madrid, Paris, Bruxelles…), en Asie, en Amérique latine et, récemment, en Afrique (Marrakech, en 2018). Il passe pour le symbole de la mondialisation heureuse éclairant le monde, bien qu’il ne soit que l’application à un certain type de marchandises des méthodes du commerce et de la Bourse. Dans une foire, une œuvre est une certaine somme d’argent et une occasion de spéculation. Les considérations artistiques sont secondaires.
Changement de ton
On ne peut que le regretter. Mais, si justifiées soient-elles, ces attaques, portées par des artistes las d’être traités comme des marques commerciales et des critiques agacés de s’entendre demander quel serait le « bon achat », n’ont, en un quart de siècle, ni...
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