Hervé Chapron et Michel Monier, du Cercle de recherche et d’analyse sur la protection sociale, expliquent que les professions libérales et indépendantes, les fonctionnaires et parlementaires doivent participer à financer cette exception française.
Tribune. Dans une tribune publiée le 30 avril dans les colonnes du Monde (« Monsieur le Président, cet oubli de l’art et de la culture, réparez-le ! »), de nombreuses personnalités du monde des arts et de la culture témoignent de leur inquiétude devant les conséquences économiques inéluctables de la crise sanitaire pour les acteurs du secteur culturel. Ils demandent une prolongation des droits dans le cadre de leur régime spécifique, celui des intermittents du spectacle d’une année au-delà des mois où toute activité aura été impossible.
Qui peut nier que la culture est une exception française, que le rayonnement de la France ne peut se concevoir sans ce pan de création qui à travers les siècles et à travers toutes ses représentations a forgé une certaine idée que le monde entier se fait de nous.
Ni les partenaires sociaux, ni les pouvoirs publics ne l’ont jamais ignoré et l’ont bien souvent encouragé au-delà de toute considération financière. Déjà le Front populaire mettait en place un embryon de régime spécifique pour atténuer les contraintes des professions participant au secteur culturel, avant même que la protection sociale se structure à la Libération suivant le programme du Conseil national de la Résistance (CNR).
Une évidente nécessité
Intégré par la suite au régime d’assurance-chômage, il en est de toute évidence dérogatoire pour en devenir un statut. Récemment, lors de la dernière négociation – avortée – de l’assurance-chômage en juin 2019, le ministre de la culture a préservé ce régime bien que fortement déficitaire (d’un milliard d’euros par an) en l’excluant du champ des débats.
L’appel lancé par ces personnalités de la culture est opportun au moment où une réflexion doit être engagée par l’Etat avec les partenaires sociaux, sur l’indemnisation du chômage. Adapter le régime d’indemnisation des intermittents est une évidente nécessité, quoi qu’il en coûte.
Cet appel est opportun, mais il manque d’ambition car ce dont il s’agit en réalité, c’est tout autant que les intermittents qu’il faut aider, que leur régime d’indemnisation qu’il faut adapter. Il ne s’agit pas seulement de trouver à prolonger les droits des intermittents mais à réinventer le système d’indemnisation dont ils bénéficient aujourd’hui.
A l’évidence, une assurance contre le chômage ne suffit plus. Il faut que la solidarité vienne la compléter : un effort de solidarité de toute la communauté nationale devient indispensable. Il faut aujourd’hui que tous les citoyens participent au financement de cette exception française !
Bien commun
En d’autres termes, ce régime des intermittents structurellement déficitaire et plus encore demain, ne doit plus être financé par les seuls salariés du privé. Les professions libérales et indépendantes, les fonctionnaires et parlementaires doivent maintenant participer aussi à financer cette exception française. Qui peut, aujourd’hui, ne pas être concerné par le sauvetage du patrimoine culturel vivant, ce bien commun ?
Si cet appel doit être entendu pour...
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