S’ils représentent une réelle bouffée d’oxygène pour le secteur culturel, les 2 milliards d’euros annoncés par le premier ministre, Jean Castex, ne régleront pas tous les problèmes liés à la crise due au Covid-19.
Editorial du « Monde ». L’exécutif a enfin pris au sérieux la détresse du monde de la culture. En annonçant, mercredi 26 août sur France Inter, une enveloppe de 2 milliards d’euros pour ce secteur sinistré par la crise due au Covid-19, le premier ministre, Jean Castex, a envoyé un signal fort : au même titre que l’automobile, l’aviation ou le tourisme, la culture doit être massivement soutenue dans cette période de salles de concerts fermées, de festivals annulés et de théâtres ouverts avec un siège sur deux inoccupé.
Venue apporter son soutien à Avignon, privé de son grand rendez-vous théâtral, Roselyne Bachelot, tout juste nommée ministre de la culture, avait déclaré fin juillet que le secteur représentait « autant que l’agriculture et sept fois l’industrie automobile » dans le PIB français. La culture comme source de revenus et de richesses et non plus comme facteur de dépenses. Le changement de dialectique est important.
L’étendue des dégâts est, il est vrai, immense. La chute de chiffre d’affaires liée à la crise sanitaire est évaluée par la Rue de Valois à 22,3 milliards d’euros par rapport à 2019 (soit un recul de 25 %). Parmi tous les domaines passés à la loupe, le spectacle vivant – théâtre, cirque, concerts, festivals –, mais aussi les musées, les sites touristiques, les galeries d’art et les arts plastiques sont ceux qui ont le plus souffert. Au Musée d’Orsay, par exemple, les pertes de recettes propres de l’établissement sont estimées cette année à 28 millions d’euros – dont 22 millions rien qu’en billetterie.
L’attitude du public sera déterminante
Depuis le début de la pandémie, le gouvernement n’est pas resté inactif. Entre mars et juillet, il a mobilisé plus de 5 milliards d’euros. La fameuse « année blanche » préserve les droits des intermittents du spectacle jusqu’au 31 août 2021. Mais la dérogation accordée au Puy du Fou pour s’affranchir de la jauge des 5 000 spectateurs autorisés et le flou concernant les règles de distanciation dans les salles ou sur les plateaux ont alimenté l’incompréhension et le ressentiment des milieux culturels.
S’ils représentent une réelle bouffée d’oxygène, les 2 milliards annoncés par Jean Castex ne régleront pas tous les problèmes. La ventilation des aides entre les différents opérateurs publics et privés n’est pas encore réalisée. Elle fera forcément des déçus. Mais ce qui mine le plus le moral est l’incertitude qui plane sur l’avenir, en raison du risque épidémique. Comment concevoir une programmation culturelle pérenne, lancer un artiste en tournée ou faire venir des artistes étrangers alors que des départements peuvent à tout moment basculer du vert au rouge ?
Au-delà des aides, l’attitude du public sera déterminante pour la relance – et la survie – de nombreux lieux culturels. « Quand il aura déjà mis un masque toute la journée pour aller travailler, supportera-t-il aussi de l’avoir le soir pour aller au spectacle ? », interroge...
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