Dans une lettre ouverte, Alexis Corbière exhorte Rachida Dati à ne pas céder aux sirènes d’une droite réactionnaire qui souhaiterait que le parc d’attractions du Puy-du-Fou puisse bénéficier du Pass culture en tant que «spectacle d’art vivant».
Madame la ministre Dati,
Comme vous le savez, le Pass culture, défini en 2019 comme «chantier culturel prioritaire du quinquennat» d’Emmanuel Macron, a été généralisé en 2021. Il permet de délivrer un chèque de 300 euros (contre 500 euros auparavant) à destination des jeunes de 15 à 18 ans. Bien que le constat de son inefficacité ait été assez largement partagé, car profitant essentiellement aux entreprises véhiculant une culture de consommation de masse et participant à la marchandisation de la Culture, celui-ci a pourtant été maintenu.
Or, depuis quelques jours, une polémique a été montée de toutes pièces, par des courants de la droite réactionnaire et conservatrice ainsi que de l’extrême droite, sur les acteurs culturels pouvant y prétendre. Ces réseaux dénoncent l’inéligibilité du parc du Puy-du-Fou au Pass culture. Ils estiment qu’il s’agit d’une inégalité de traitement et qu’ils subissent une injustice dirigée, selon eux, de manière politicienne notamment par «la gauche wokiste», les «gauchistes» ou encore «l’extrême gauche». En effet, à l’instar de Philippe de Villiers, créateur du Puy-du-Fou, tous s’alarment d’une pseudo-propagande idéologique.
Madame la ministre, suite à ces accusations assez grossières, vous avez annoncé sur X (ex-Twitter) le 18 janvier que vous aviez «demandé à [vos] services d’examiner la demande du Puy-du-Fou concernant l’éligibilité à la part individuelle du Pass culture». Je m’interroge. Pourquoi ce retour en arrière ? Pourquoi céder face à la controverse fabriquée par l’extrême droite ? Enfin, et alors que des critères précis encadrent ce dispositif, cela veut-il dire qu’ils seraient modifiés dans l’unique objectif de rendre éligible le Puy-du-Fou ? En effet, comme indiqué dans le vade mecum du site du ministère de l’Education nationale présentant le cadre d’éligibilité des acteurs culturels, il est précisément explicité que : «Ne sont pas éligibles : les agences et organisateurs de voyage ; les parcs d’attractions ; les sociétés d’organisation de jeux ; d’escape game.»
Ainsi, comme le prétend monsieur de Villiers, ce n’est donc pas spécifiquement le Puy-du-Fou qui est visé et écarté, mais bien tous les parcs d’attractions tels que le parc Astérix, Disneyland ou encore le Futuroscope. Parmi les arguments avancés par les défenseurs du parc vendéen, il y a celui expliquant que le Puy-du-Fou ne serait pas un parc d’attractions mais un «spectacle d’art vivant», ce qui lui donnerait accès à ce dispositif. Or, les créateurs du Puy définissent eux-mêmes le parc comme un parc d’attractions sur leur site internet.
Ainsi, sur la page mettant en avant leurs récompenses, nous pouvons voir les explications suivantes : en 2022, n° 1 des parcs à thèmes en France et en Europe ; en 2020, meilleur site d’attractions français ; en 2013, meilleur parc à thèmes européen avec comme précision : «C’est la première fois qu’un parc français remporte ce prix prestigieux pour l’industrie des parcs de loisirs, parcs à thèmes et parcs d’attractions en Europe, prouvant ainsi que le Puy-du-Fou occupe une place à part dans l’univers du divertissement mondial» et enfin, «élu à deux reprises “meilleur parc d’attractions du monde” à Los Angeles en 2012 et à Orlando en 2014, le Puy-du-Fou acquiert rapidement une notoriété internationale et s’impose aujourd’hui sur le plan mondial comme une référence en matière de parcs et de spectacles.»
Madame la ministre, je tiens aussi à rappeler qu’un parc à thèmes est «un type de parc d’attractions qui base ses structures et ses attractions sur un thème central, comportant souvent plusieurs zones avec des thèmes différents».
La mise en avant du «génocide vendéen»
Enfin, et pour répondre à celles et ceux qui ont créé la polémique faisant passer le parc d’attractions pour une scène de théâtre et dénonçant une censure wokiste de leurs productions culturelles, ne pas rendre éligible les parcs d’attractions permet justement de séparer l’industrie du divertissement de celle la culture. Ici, la droite réactionnaire et l’extrême droite tendent un...
Lire la suite sur liberation.fr