Après un audit de six mois, les magistrats de la juridiction financière estiment que la stratégie du CNM “manque de clarté” et suggèrent une “réforme en profondeur”... déjà largement engagée, rétorque l’institution.
Mais qu’a donc la Cour des comptes de si grave à reprocher à la maison commune de la musique ? Voilà la question qui a surgi à la lecture du communiqué publié en fin de semaine dernière, dans lequel l’organe chargé du contrôle des comptes publics étrille purement et simplement le Centre national de la musique (CNM) sur sa gestion et la conduite de ses missions. Et en appelle même à « une réforme » urgente ! Un constat d’une sévérité d’autant plus surprenante que depuis sa création, le 1ᵉʳ janvier 2020, le CNM jouit au sein de la filière musicale d’une image globalement positive, notamment pour sa gestion de la crise du Covid et son soutien aux structures en difficulté.
L’opérateur de l’État, doté il est vrai de moyens importants et d’un budget en hausse (147 millions d’euros en 2024), s’est aussi imposé en parvenant à relancer le secteur, et en instaurant de nouveaux leviers de financement de la filière, comme la délicate mais nécessaire taxe streaming. Un bilan pas étranger à l’action de Jean-Philippe Thiellay, son président, dont le mandat de cinq ans, arrivé à son terme le 31 décembre 2024, n’a pas été reconduit. L’Élysée, Matignon et le ministère de la Culture ont expliqué pudiquement ce choix par le « besoin d’un nouvel élan et donc d’une nouvelle incarnation pour la suite ». Mais aussi par des couacs dans sa gestion ?
À en croire les magistrats de la Cour des comptes, qui ont mené un audit de six mois auprès du CNM, jusqu’en juin 2024, la stratégie de l’opérateur public « manque de clarté », le « saupoudrage des aides » qui prévaut doit être repensé au profit d’un système d’octroi clair et étayé. Par ailleurs, une « réforme en profondeur » doit être engagée, pour « mettre en place un contrôle des fonds distribués » et évaluer leur impact sur la filière musicale. Difficile de faire plus critique à l’égard d’un opérateur de l’État censé appliquer une politique publique de la musique.
Joint au téléphone, Jean-Philippe Thiellay, encore en poste jusqu’au 31 janvier avant la nomination d’un ou d’une successeur(e), ne s’émeut pas de la sévérité de la Cour des comptes. Sur le fond, selon lui, il n’y a aucune critique sur la gestion pure, les frais de fonctionnement… Tout juste relève-t-il la terminologie catastrophiste de l’institution, « une habitude », dit-il, et qui ne concerne pas que le CNM.
Des recommandations déjà appliquées
Pour expliquer cette sévérité apparente, le président du CNM évoque un problème de temporalité dans le rapport : « Une grande partie des recommandations, notamment sur la refonte des aides, l’évaluation d’impact ou la transparence ont été mises en place depuis l’été, à l’issue de l’audit de la Cour des comptes, dont le rapport final ne prend donc pas en compte les ajustements opérés depuis. » À savoir : la réforme des aides, l’adoption d’un contrat d’évaluation d’efficacité…
De ce décalage naît l’impression que l’organisme se fait tancer par les magistrats alors qu’il a écouté et appliqué les recommandations mentionnées dans le pré-rapport livré en juin. D’où aussi la tonalité étonnamment positive qui émane du Centre national de la musique dans sa réaction publiée dans la foulée du rapport la semaine dernière, par les mots de son...
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